Chapitre 13 - La fin des illusions

Par Keina

« — Comment vous sentez-vous ?

— Morte… »

Valek, Pandemonium

 

Au diable la recommandation des Onze, au diable les inquiétudes de Luni ! Elle se leva d’un bond, affolée, confuse, éperdue. Dans l’impulsion, l’affichette voleta dans les airs et atterrit sur le parquet. Sur le papier, Nephir souriait toujours, souriait à son public, souriait de sa traîtrise. Ses yeux noirs, vivants, flamboyants, transpercèrent la chair et les os de la jeune fille. Deux noms flottaient obscurément dans son cerveau.

Amy, Gaétane…

Elle devait retourner dans son monde, s’assurer qu’elles allaient bien ! Tremblante de tous ses membres, elle réajusta tant bien que mal ses dessous et enfila à la hâte une jupe de tweed, un corsage de lin blanc et un boléro, sous lequel elle prit soin de dissimuler une dague à la lame d’acier. Si Nephir tentait de s’en prendre à sa famille, elle saurait l’accueillir. Les Onze ne me maintiennent pas encore prisonnière, n’est-ce pas ? songea-t-elle en fermant la porte de ses appartements, son chapeau de ville maladroitement posé sur un chignon grossier.

 

Mince silhouette incognito que le clair de lune prit un malin plaisir à souligner, Keina s’échappa du Château, laissant derrière elle sa ronronnante activité. Les talons de ses bottines claquèrent – un peu trop fort à son goût – sur le pavé de la route principale. Autour d’elle, le Royaume se recroquevillait dans la nuit, engourdi par les frimas de novembre. La silfine murmura trois fois le nom de son elfide, et Lady apparut enfin, trottant à sa rencontre. Son pelage luisait d’une teinte turquoise qui fit naître un sourire discret sur les lèvres de sa maîtresse.

— Tu sais, Lady, lui susurra-t-elle à l’oreille en flattant son encolure, je doute qu’on passe inaperçues dans Londres avec cette couleur. Dans mon monde, les chevaux bleus ne courent pas les rues !

L’elfide cligna de ses longs cils et sa robe se métamorphosa pour arborer une couleur isabelle nettement plus sobre. Keina hocha le menton, enfourcha en silence la jument elfique et lui intima un ordre mental qu’elle mit aussitôt en action.

 

*

 

Le vent sifflait à ses oreilles. Elle garda un instant les yeux fermés, priant intérieurement pour que le passage de la Trouée ne la trahisse pas. Les portes du Royaume fermaient l’horizon, tâches de ténèbres qui avalaient les rayons de lune et jetaient une ombre grandissante sur la cavalière et sa monture. Au bas des imposants remparts de bois brut, la Rivière du Milieu, si calme lorsqu’elle sinuait entre les deux routes principales, lâchait ses eaux furieuses contre le basalte de la montagne avant de se perdre dans les profondeurs du cratère. Ici, le hurlement des flots rompait la paix nocturne, comme si le diable lui-même lançait un avertissement à quiconque voulait s’esquiver.

Dès qu’elle fut proche de la Trouée, Lady ralentit, et Keina sentit son cœur tambouriner contre sa poitrine. Tout était perdu, les portes refuseraient de la laisser passer, et la malice de Nephir l’emporterait ! Elle retint sa respiration, puis expira en douceur lorsque l’accès de l’ouest se mit en branle, étouffé par le tumulte des courants qui s’enfonçaient dans l’abîme. Peu à peu, la traverse se révéla à elle, scintillant dans la nuit comme un éperon de diamant brut. L’autre extrémité, séparée de la silfine par un petit mile, lui dévoila un amalgame de magie pure qui palpitait dans l’obscurité.

Le Passage.

Derrière se trouvait Londres, sa bonne et vieille Londres, ses voitures et ses piétons qui se mêlaient dans une folle anarchie, le charme authentique du district de Camden, Russell Square Garden et ses élégantes du dimanche, la douillette maison de ville qui se dressait au 32, Bedford Place, et en son sein, sa propre famille, Amy qui l’avait élevée comme sa fille, Edward son frère d’adoption, Mary la domestique, Martha, Joanna et William, ses trois adorables élèves, et même ce vieux hibou de Georgianna… !

Elle inspira à nouveau, réfrénant l’envie de jeter un oeil en arrière. Elle n’avait emprunté cette route pour la dernière fois que six mois plus tôt, et il lui semblait pourtant n’être pas venue depuis une décennie. Mais aujourd’hui, la peur qui l’animait n’avait plus rien à voir avec l’appréhension d’une nouvelle vie. De l’autre côté l’attendait son véritable foyer, elle en était persuadée.

Chez soi, c’est là où on se sent bien. C’est là où notre cœur a chaud.

Les mots résonnèrent une fois encore à son oreille, lointains, presque effacés. Réussirait-elle enfin à s’éloigner de l’iceberg, à réchauffer son cœur frigorifié ? Ou bien l’énorme montagne de glace l’accueillerait-elle où qu’elle aille ?

Peu importe ! hurla sa conscience. Tu dois découvrir les intentions de Nephir. Tu dois t’assurer de la sécurité des êtres qui te sont chers. Si l’iceberg te poursuit jusque chez toi, alors tu l’affronteras.

… alors tu l’affronteras.

L’injonction qu’elle donna à Lady était irrévocable. Elle ne ferait plus marche arrière.

 

*

 

De l’autre côté, le fog londonien n’avait guère changé. Keina prit une longue inspiration et sourit pour elle-même. Enfin, elle s’y trouvait, dans le monde réel. Dans sa réalité. L’affiche qui l’avait conduite jusqu’ici flottait, presque insignifiante, dans un recoin de son cerveau, en arrière-plan. L’air qui lui piquait les poumons, les relents des égouts, la fumée des usines, la boue crasseuse qui maculait les pavés… eux étaient palpables, concrets ! La silfine toussa, désaccoutumée de cette atmosphère lourde qui contrastait tant avec le souffle magique des montagnes du Royaume. Six mois… six mois seulement lui avaient suffi pour perdre ses repères humains.

Elle sauta au bas de son elfide et fit un tour sur elle-même pour apprécier l’endroit. Après avoir hésité à l’entrée du Passage, Lady, nerveuse, l’avait finalement emmenée dans un cul de sac tranquille, éclairé par un unique gaslight. Keina lui caressa les naseaux pour calmer l’inquiétude qui agitait encore son épiderme.

— Rassure-toi, Lady, tu ne t’es pas trompée. Je suis chez moi ! (La jument hennit doucement.) Je n’en ai pas pour longtemps. Je vais juste m’assurer qu’Amy se porte bien et prendre des nouvelles de Gaétane. Et quand je reviendrai, tu seras là, n’est-ce pas ?

Un second hennissement, plus calme. Keina effleura son pelage du bout des lèvres et courut à l’autre bout de l’impasse. La rue bouillonnait d’une agitation nocturne qu’elle reconnaissait entre mille. Hauts-de-forme en goguette et melons égrillards naviguaient joyeusement de pub en pub, la démarche houleuse guidée par l’écho des pintes et l’arôme de l’absinthe. Parfois un groupe harponnait, sur le trottoir, une femme en cheveux dont les gloussements espiègles répondaient au tohu-bohu qui jaillissait des salles enfumées.

Soho !

Elle se pinça une lèvre, le cœur battant. À quelques rues de là seulement, sa maison l’attendait. Sans réfléchir, elle héla un fiacre vide qui passait. Il restait quelques shillings dans sa bourse, inutilisables au Royaume. Une bottine posée sur le marchepied, elle jeta un œil dans l’impasse : Lady avait disparu. Repartie dans les montagnes, certainement…

Keina ne s’en alarma pas davantage et, d’une impulsion, grimpa dans l’habitacle.

 

*

 

Lorsque l’élégante façade de briques se profila dans le halo des lampadaires, la jeune fille sentit son cœur lui manquer. Elle se dressait, droite et fière, entre deux bâtisses d’architecture similaire. Au dernier étage, une verrière ouvragée la singularisait de ses voisines. La voiture eut à peine le loisir de marquer l’arrêt : Keina, jupe relevée, s’était déjà précipitée sur les marches du perron.

Elle agrippa le heurtoir et toqua à tout rompre. Les fenêtres du rez-de-chaussée projetaient à travers les rideaux une luminosité diffuse : Amy veillait certainement en compagnie de son fils, dévorant quelque traité sur la condition féminine, tandis que lui feuilletait son journal financier. Enfin, la porte s’ouvrit à demi, révélant à la lueur d’une lampe à pétrole le visage circonspect de Mary. Une surprise mêlée d’un soupçon de frayeur s’y imprima lorsque la domestique reconnut l’arrivante.

— Oh ! Mademoiselle Nana, c’est vous ?

Elle fit glisser le taquet et lui céda le passage.

— Mrs Richardson est dans le salon, elle sera ravie de vous revoir, dit-elle d’une toute petite voix en la débarrassant de son manteau.

Aucune question, aucune remarque, sur cette arrivée tardive et impromptue. Le caractère effacé et la discrétion sans faille de Mary Cooper ne s’étaient pas dissipés au fil du temps.

A contrario, les cris d’Amy retentirent si fort dans la maisonnée qu’ils éveillèrent en sursaut Georgianna, que la migraine tenait au lit. Flanquée de ses enfants encore ensommeillés, elle fit irruption dans le salon en chemise et bonnet de nuit, la mine effarée et la tresse de travers. Quelle était cette catastrophe ? Le feu, l’inondation, un accident ? Rien de tout cela, lui répondit silencieusement la mine réjouie de sa belle-mère : simplement l’ex-institutrice de la maison.

Dès qu’ils la virent, Martha, Joanna et William se ruèrent dans ses jupons pour fêter son retour. Keina les enlaça en riant, puis leva son regard sur Georgianna, postée à côté d’Edward, qui affichait quant à lui un flegme tout britannique. La mine que sa femme allongeait aurait pu au contraire servir à illustrer le plus dévastateur des cataclysmes, et procura assez de bonheur à Keina pour lui retourner un sourire triomphant. Envolée la crainte, disparus les soucis ! Elle était de retour chez elle.

 

*

 

Après avoir commandé du thé auprès de la cuisinière, Amy s’installa aux côtés de sa petite protégée. Les enfants étaient repartis se coucher avec la promesse qu’ils retrouveraient leur préceptrice au réveil, et les époux Richardson attendaient l’explication que leur devait Keina. La maîtresse de maison les congédia aimablement. La jeune fille avait fait un long voyage, et souhaitait sans doute se reposer. Pas question de l’ensevelirent sous les questions !

Dès qu’elles furent seules, Keina put enfin se confier à sa protectrice, et lui faire part de ses angoisses. Amy l’écouta religieusement, hochant parfois la tête en signe d’assentiment. Elle ne connaissait pas toute l’histoire du Royaume, mais en savait suffisamment pour comprendre les frayeurs de la silfine, et l’inquiétude de ses semblables. Un froncement de sourcils accueillit la nouvelle de son évasion. Légèrement honteuse, Keina voulut la rassurer en lui affirmant qu’elle avait obtenu une autorisation spéciale des Onze mages et laissé un message à l’attention de ses tuteurs et amis. Personne ne s’inquiéterait donc de son départ précipité ! Après tout, s’efforça-t-elle de se justifier mentalement, son anxiété légitimait bien un petit mensonge… Rassérénée, la vieille dame exerça une pression chaude sur le dos de ses mains. Pour changer le tour de la conversation, elle lui annonça soudain que son fils venait de faire installer le téléphone dans la maisonnée.

— Si tu avais pu voir la tête de Georgianna ! ajouta-t-elle avec un sourire malicieux. Je ne comprends pas pourquoi elle est à ce point réfractaire à toute forme de progrès. Quel dommage que Gaétane en soit privée ! Le Hampshire est si éloigné de Londres… Oh, sais-tu que j’ai reçu une lettre de sa part, il y a deux jours ? Non, trois ! Oh là, là, je n’ai plus la notion du temps… Elle vient ici pour la saison, avec ses enfants. Le presbytère ne peut malheureusement pas se passer longtemps de mon beau-fils, mais il nous rejoindra dès qu’il en aura l’occasion.  Si tu me promets de prévenir tes tuteurs, peut-être pourras-tu profiter un peu de sa présence. Oh ! Ne serait-ce pas formidable ? Comme au bon vieux temps ! Tu seras notre invitée. À ce propos, je suis persuadée que tu détesteras la nouvelle préceptrice ! Georgianna l’a recrutée sans aucun doute pour se venger de moi ! Va, ne t’en fais pas. Ce que tu as cru voir sur cette vieille affiche n’était probablement qu’un tour de passe-passe, une mauvaise plaisanterie. Au diable le Royaume Caché, au diable ses intrigues qui me dépassent ! Pour l’heure, je suis bien aise qu’elles t’aient ramenée à nous.

Tandis qu’elle l’écoutait, Keina la revit, l’affiche et son anomalie, ce visage glacé, déterminé, qui semblait la poursuivre où qu’elle se trouve. Dès son arrivée, l’ombre de Nephir s’était évanouie, substituée par la joie de retrouver sa famille d’adoption. Mais, alors qu’elle contemplait les flammes d’une bougie qui achevait de se consumer sur le piano, la terreur se lova à nouveau au creux de son ventre, remonta jusqu’à son oesophage, noua ses cordes vocales. Amy se tut soudain, alertée par le trouble de la silfine. Le silence s’installa.

Tout doucement, la vieille dame passa ses mains autour des épaules de sa protégée et la guida contre sa gorge généreuse, tandis que ses lèvres entamaient une berceuse aux intonations douces. Keina ferma les yeux et se concentra sur ses propres battements de cœur. Le geste, si souvent exécuté lorsque, enfant, elle était prise de terreurs nocturnes qui la tétanisaient, réchauffa la jeune fille.

Tout allait bien.

Elle était chez elle maintenant.

 

*

 

Il ne fallut pas beaucoup de supplications pour qu’elle se laisse convaincre de rester quelques jours pour profiter de la venue de Gaétane. Chaque matin, Keina se promettait d’envoyer un message au Château afin de rassurer Luni, Lynn et ses tuteurs, mais repoussait sans cesse son devoir à plus tard. Sans qu’elle s’en rendît compte, le tourbillon de la vie mondaine l’avait déjà entraînée loin des turpitudes du Royaume.

Elles sortirent au théâtre, sillonnèrent les cercles et les salons, et Amy persuada même la jeune fille de l’accompagner à plusieurs réunions de suffragettes. Car l’Histoire était en marche ! Du National Union of Woman’s Suffrage Society, dans lequel la doyenne des Richardson oeuvrait depuis cinq ans, un nouveau groupe avait émergé à Manchester, le WSPU, qui, las de discussions fertiles, préconisait des actions plus offensives à l’égard du gouvernement. Menées par Emmeline Pankhurst qu’Amy connaissait de longue date (leurs défunts maris avaient fréquenté ensemble les bancs de l’université de Londres), les suffragettes étaient nées. Et elles comptaient bien se faire entendre ! Suite à d’interminables échanges téléphoniques, la veuve s’était proposé de répercuter l’événement dans la Capitale et de recruter des adeptes. De la Chambre des Communes aux rues de la City, les dames en colères s’apprêtaient à scander à la face du monde leur cri de guerre : Deeds, not words !

Keina écouta les discussions avec attention, ravie de se consacrer à une cause qui n’incluait ni sombre complot ni magie capricieuse. Cependant, le retour dans son ancien monde la fatiguait plus que d’ordinaire. Elle devait fournir un effort constant pour canaliser l’énergie qui s’échappait sans cesse de son corps. D’habitude, les agents qui sortaient du Royaume emmenaient avec eux une quantité limitée de particules enchantées dont ils devaient disposer avec parcimonie pour éviter de l’épuiser durant la mission. Mais dans son cas, le réservoir ne semblait vouloir se tarir, et contenir ce flot inextinguible la laissait bien souvent à la limite de ses forces. À plusieurs reprises, elle avait été à deux doigts de trahir son origine. Et plus les jours passaient, bien qu’elle gardât constamment sa bonne humeur et son entrain, plus son teint pâlissait.

 

— L’temps de Londres n’vous convient plus ben, mam’zelle Nana, commenta un jour Elisa, la cuisinière, alors que la jeune fille était venue chaparder quelques pommes dans son antre. Ah ça, les Amériques doivent vous manquer, pas vrai ?

Ce matin-là, la neige avait saupoudré la ville d’une fine couche de sucre glace, et un parfum de fête se répandait par les rues. Dans le courant de l’après-midi, un fiacre en provenance de la gare devait déposer Gaétane et ses deux enfants devant la porte, mais pour l’heure, la maison somnolait. Edward s’était rendu à la banque, Georgianna ruminait ses humeurs dans le salon, la gouvernante promenait les enfants au parc, et Amy bataillait au téléphone pour obtenir une communication avec Edith Stewart, une jeune suffragette qui avait entamé une grève de la faim.

Keina retourna un sourire las à la domestique. Pour le reste de la famille – excepté Amy et, bientôt, Gaétane –, elle avait prétexté un voyage impromptu, payé par l’héritage de sa vieille tante morte depuis peu. Encore un mensonge. Alors qu’elle s’apprêtait à répondre une banalité, Mary fit irruption dans la cuisine, un plateau en main.

— Du thé pour Mrs Richardson ! claironna-t-elle d’une voix fluette en déposant son fardeau sur un coin de la table.

Eli soupira, tandis que Mary remarquait la présence de Keina.

— Oh, bonjour, mademoiselle ! murmura-t-elle avec une petite révérence.

En se redressant, la domestique lui lança un regard qui paralysa ses vertèbres. Une étrange lueur teintée de tristesse palpitait au fond de ses pupilles sombres.

— Partez d’ici, je vous en prie ! chuchota-t-elle, entre ses incisives légèrement écartées. Partez avant qu’il ne soit trop tard.

La jeune fille sursauta, la perception soudain brouillée. Le silence l’environna brutalement, accompagné d’un froid polaire qui lui glaça les os. Une seconde, puis tout s’arrêta. La cuisinière se tourna vers la petite servante et se mit en devoir de lui raconter les derniers ragots du voisinage, tandis que, sur le feu, la bouilloire sifflait. Rien, dans le comportement de Mary, ne témoignait de la singularité de ses propos. Mais le cœur de Keina battait la chamade. Elle n’avait pas rêvé ! Ses bras marquaient toujours la chair de poule. Machinalement, elle les enroula contre sa poitrine, comme pour se protéger d’un péril venu de nulle part et partout à la fois. La fatigue la maintenait dans un brouillard confus. Quelque chose clochait…

Tu devrais partir toi aussi !

Les mots de Dora résonnèrent dans un coin de son esprit, lointain.

Elle était partie cependant ! Elle avait quitté le Royaume et ses menaces perpétuelles, elle était retournée chez elle ! Devait-elle fuir à nouveau ? N’y avait-il aucun lieu dans l’univers où elle trouverait sa place ?

Non. Tout irait bien. Elle ne s’enfuirait pas encore. Oh, bien sûr, elle reviendrait au Royaume, plus tard ! Mais aujourd’hui, Gaétane et Amy comptaient sur elle et sur son amitié.

Elle ferait face.

 

*

 

L’arrivée de Gaétane propulsa l’incident au rang des fantasmagories causées par la fatigue. Alors que la jeune femme descendait péniblement du fiacre, un bébé endormi entre ses bras et une fillette haute comme trois pommes accrochée à ses jupes, Keina apparut dans l’entrée, un sourire radieux épinglé sur ses lèvres. La surprise de la cadette des Richardson fut telle qu’elle faillit en lâcher son petit dernier, et, en même temps que le majordome entreposait les bagages sur le pavé, les embrassades durèrent un peu plus que ce que la convenance exigeait. Bien vite, les enfants furent confiés à la gouvernante, et les deux amies s’enfuirent dans une chambre pour y converser en paix.

— Ainsi, il était amoureux de ta propre mère ? Mais quel goujat !

Une main devant la bouche et les yeux en soucoupe, Gaétane s'ébahissait, s’indignait, s’émerveillait à mesure que Keina déroulait son récit. Affalées comme deux adolescentes sur l’ancien lit de la silfine, elles rattrapaient six mois de séparation avec toute la verve et l’émoi de deux camarades d’enfance.

— Hum hum, acquiesça Keina en croquant dans une pomme. Mais je m’étonne que tu n’aies pas reçu mes courriers. Comme tu as dû me trouver ingrate de ne pas te donner de mes nouvelles ! D’habitude, le service postal du Royaume fonctionne à merveille…

— Oh, tu sais, le presbytère est vraiment loin de tout. N’en parlons plus ! Ça me rappelle que maman tient un meeting auquel nous sommes invitées, demain, il me semble… T’en a-t-elle touché un mot ?

— Ah, ça ! Je crois qu’elle veut nous voir agiter des banderoles et hurler des obscénités aux aimables policemen pour être fière de nous. Amy a parfois de drôles d’idées…

— Maman a toujours des drôles d’idées. Ce n’est pas nouveau. Bah, ça peut être amusant, non ? Alors, ce Luni, que t’a-t-il répondu finalement ? Qu’il était un mufle, qu’il n’aimerait dorénavant que toi et qu’il souhaitait t’épouser sur le champ ? Si c’est le cas, j’espère que tu as rejeté sa demande. Il faut leur apprendre un peu, à ces hommes ! Maman te sera de très bons conseils à ce sujet.

Le nez dans son fruit, Keina manqua de s’étouffer de rire, et elles repartirent de plus belle, discutant de tout et de rien jusqu’à l’irruption d’Amy, qui leur proposa de prendre le thé dans le salon.

Et l’après-midi s’écoula en douceur, hors du temps, des tracas et des malédictions.

Que cela dure toujours… s’il vous plaît.

Mais le bonheur n’était pas éternel.

 

*

 

Le lendemain, la journée s’annonça aussi belle que la veille. La neige étincelait sous l’azur éclatant du ciel, et dans les parcs et les jardins, des enfants de tous âges s’appliquaient à la modeler au gré de leur imagination. Keina et Gaétane accueillirent les arrivantes avec un enthousiasme modéré, regrettant de rester enfermées par un soleil si rare dans la capitale britannique.

Réunies dans le salon de la maisonnée (Georgianna s’y était opposée farouchement, mais avait dû s’incliner devant la détermination de sa belle-mère et boudait pour l’heure dans sa chambre), les suffragettes se disputaient pour convenir des meilleures méthodes à adopter face à un gouvernement amorphe. Devaient-elles toutes entamer une grève de la faim, comme certaines d’entre elles, organiser un sitting dans Hyde Park, investir les bancs du Parlement ? Certes, chaque décision demandait au préalable l’accord d’Emeline Pankhurst et de ses deux filles, qui menaient le mouvement depuis Manchester. Mais ne fallait-il pas aussi songer à attirer l’attention de la presse ?

Durant le débat, Amy gardait un calme imperturbable, et répondait en souriant que la précipitation n’avait jamais aidé personne, et qu’il était nécessaire de s’accorder le temps de la réflexion afin d’élaborer un plan d’attaque.

Assise au fond de la pièce sur une chaise de paille inconfortable, Keina se frotta le front en soupirant. Le bruit martelait ses tympans. Trop de voix, trop de femmes, trop de chaleur… Elle adressa un sourire d’excuse à Gaétane qui s’efforçait sans grande conviction de suivre la polémique, et se leva pour prendre un bol d’air. Dans le vestibule, Mary, toujours à disposition, lui tendit un manteau de laine qu’elle enfila aussitôt.

Le froid piquant de l’extérieur l’apaisa légèrement. Elle descendit les quelques marches du perron et s’installa sur la première d’entre elles, frictionnant ses mains pour les réchauffer. À sa droite, une troupe d’enfants s’activait autour d’une masse de neige et de boue qui ressemblait aussi peu à un bonhomme qu’une vache à lait à un pur-sang. Un sourire se dessina sur ses lèvres alors qu’elle se remémorait les calamiteuses œuvres d’art qu’elle et Gaétane avaient confectionnées durant leur jeunesse. Malgré la différence d’âge, les deux fillettes s’étaient entendues dès la première seconde, et Gaétane lui avait patiemment enseigné tous les jeux qu’elle n’avait jamais appris au Royaume.

Égarée dans ses souvenirs, elle vit trop tard la volute de magie qui s’était échappée de sa paume et voltigeait dans les airs. Elle se dressa d’un bond et tenta de la dissiper du dos de la main, mais une petite fille s’était détachée du groupe et s’approchait déjà, contemplant avec de grands yeux étonnés le nuage vert-de-gris. Keina se mordit une lèvre, tandis que la gamine levait un gant hésitant vers les particules en suspension dans l’atmosphère.

— Qu’est-ce que c’est ? De la neige ? demanda-t-elle d’une minuscule voix en essayant de les attraper.

À peine en eut-elle touché une qu’elle poussa un cri aigu. Keina plaqua une main devant sa bouche, horrifiée, une exclamation sourde coincée au fond de sa gorge. Au bout du bras tendu vers l’énergie enchantée, la mitaine s’était dissipée, laissant apparaître derrière elle le métal d’un réverbère. Les particules s’agitèrent un instant, puis, mues par un sortilège inconnu, fusèrent dans l’ouverture béante de la manche. Muette, la petite leva vers la silfine un regard où la tristesse le disputait à une pointe de curiosité, puis elle cligna des yeux, une fois, avant de s’évaporer complètement.

 Keina resta tétanisée quelques secondes, les idées figées, le cerveau asséché. La fillette avait disparu. Disparu ! Comment sa magie… ?

Quelque chose clochait…

Soudain, elle fit volte-face et s’engouffra dans la maison, les deux mains fermement arrimées à sa jupe. Sans s’occuper du salon, où les voix menaient bon train, elle escalada quatre à quatre les escaliers du vestibule. Deux pensées survolaient le flot confus de son esprit : l’ombre de Nephir planait encore sur elle, et sa dague sommeillait dans sa chambre, soigneusement camouflée sous un oreiller.

— Nana ! Que se passe-t-il ? Je sais bien que cette assemblée n’a rien de passionnant, mais maman s’inquiète de ne plus t’y voir et…

Elle s’arrêta net au milieu des marches et se retourna vers Gaétane. Celle-ci l’observait de l’entrée, un sourire sur les lèvres, qui s’effaça presque aussitôt. Keina ouvrit la bouche, voulut murmurer une excuse… et sentit ses jambes s’affaisser sous ses tremblements nerveux. Elle s’accrocha à la rampe, blanche comme la mort, et prit une inspiration.

Pas maintenant ! Tu ne peux pas flancher maintenant !

Le froid paralysait son cœur, la douleur perçait son crâne et son corps entier refusait d’obéir à son cerveau. Une drôle de sensation comprima sa poitrine. Du déjà-vu…

— Nana !

Gaétane bondit pour se porter à son secours, et au moment même où elle arrivait à sa hauteur, Keina comprit.

Elle incarnait cette silhouette menue qui descendait à sa rencontre, et Gaétane, paisible, l’attendait sur le seuil de son foyer…

C’était cette image, exactement celle-là, qu’elle avait appréhendée, lumineuse comme le flash d’un éclair, lors de sa première visite chez Anna-Maria. Sous l’effet de l’émotion, la magie commença à se déployer en de larges spirales qui s’accumulèrent au-dessus de sa tête.

Gaétane béa.

 — Seigneur tout puissant, Nana, que t’arrive-t-il ?

Méfie-toi des illusions…

Devenu maître de ses pensées, l’avertissement d’Anna-Maria entama une gigue au rythme des longues fibrilles qui tourbillonnaient autour d’elle, toujours plus hautes, toujours plus amples.

Méfie-toi des illusions, méfie-toi des illusions, méfie-toi des illusions…

Le monde se brouilla. C’était… comme se retrouver au milieu d’un tableau dont les couleurs s’effaçaient peu à peu sous l’effet d’un dissolvant. Le long du mur, le papier peint se mit à dégouliner en de lentes traces vermeilles, formant un contraste chaud avec les glyphes turquoise qui s’échappaient par tous les pores de sa peau. La rampe d’escalier elle-même s’amollissait, se déformait sous les phalanges chancelantes de la silfine.

Quelques suffragettes firent leur apparition dans le hall, poussèrent des glapissements aigus avant de se précipiter vers la porte laissée grande ouverte. La bise s’y engouffra, se mêla à la marée ensorcelée pour soulever les jupes de Keina et virevolta jusqu’au plafond dans un maelström verdoyant. Sur le palier du premier étage, la silhouette osseuse de Georgianna se profila dans la lumière, ses grands yeux de chouette roulant dans tous les sens.

— Par tous les saints ! Ainsi donc, Nephir ne se trompait pas, chuinta-t-elle avant de reprendre contenance sous l’air médusé de ses deux belles-sœurs. Bah, peu importe. Toutes ces années à ne faire qu’attendre… Je commençais à m’ennuyer. Mary ! (La soubrette apparut dans l’entrée.) Nous partons.

Elle descendit l’escalier avec un détachement insolite et dépassa sans un regard Keina et Gaétane, figées de surprise. Puis elle se para d’une élégante cape de fourrure que lui remit docilement Mary et traversa le perron, la petite domestique sur ses pas.

— Georgianna !

La silfine se dégagea de l’étreinte de sa sœur adoptive et bondit, son cœur battant à tout rompre. Les événements surpassaient son entendement, mais elle n’avait retenu qu’un mot : Nephir.

Georgianna connaissait la sorcière.

Dans sa précipitation, elle dérapa sur une langue de magie dévorant les degrés, posa le pied sur une marche qui n’existait plus et s’écroula dans les bras d’Amy, qui venait de surgir du salon. Un œil vers l’embrasure : Georgianna avait déjà disparu, et Mary également.

— Keina, est-ce que Nephir est la cause de tout ça ? demanda sans ambages la maîtresse de maison, le ton alarmé.

La silfine leva vers elle un regard confus. L’énergie enchantée s’attaquait à présent aux murs eux-mêmes, qui s’effaçaient aussi facilement que l’encre au contact de l’eau. Par-dessus l’odeur de neige et de thé froid, un parfum soufré saturait maintenant l’atmosphère. Gaétane, qui avait sauté au bas des marches pour fuir le vide qui gagnait les étages, s’agrippa aux épaules de Keina. Sa main flageolait tandis qu’elle jetait un œil à l’extérieur.

— Que Dieu et le Roi nous viennent en aide, chuchota-t-elle, des sanglots dans la voix. Puis, plus fort : mes enfants ! Je dois…

Elle s’élança à travers le seuil, suivie du reste de la famille. Le choc les immobilisa toutes les trois. Une pénombre verdâtre avait envahi la rue : s’échappant toujours de la silhouette gracile de la silfine, la magie s’amoncelait dans le ciel en un brouillard changeant dont les reflets dansaient avec la neige. Les toits des immeubles environnants s’étaient évaporés, et la nuit avait englouti parcs et maisons du lointain.

L’univers rétrécissait, grignoté par l’essence féerique.

— Mes enfants ! Mes enfants ! hurla Gaétane entre deux sanglots avant de se réfugier contre le sein de sa mère. Keina, fais que ça cesse ! FAIS QUE ÇA CESSE !

La responsable acquiesça sans comprendre, le cerveau prisonnier d’un monstrueux iceberg. Elle avait si mal… Anéantie par la douleur, elle ne contrôlait plus rien, ni sa magie, ni ses pensées. Amy enveloppa de ses bras les deux sœurs adoptives et entama une comptine boiteuse, la voix cassée par l’émotion. Contre sa poitrine bienveillante, Keina ferma les yeux, priant pour se réveiller, pour exorciser le cauchemar.

Un, deux, trois battements de cœur… Elle se blottit un peu plus contre sa protectrice. Nephir ne toucherait pas un cheveu de sa famille, non, pas sa famille !

Chez soi, c’est là où on se sent bien… c’est là où notre cœur a chaud.

Méfie-toi des illusions, lui souffla Anna-Maria.

Les battements cessèrent en même temps que la comptine.

Le bonheur n’était pas éternel.

Elle rouvrit les yeux, soudain consciente du vide autour d’elle, et s’effondra à terre. En place de l’herbe enneigée du jardin, sa joue percuta une pierre dure et glacée.

Amy et Gaétane avaient disparu, de même que le monde qu’elle connaissait.

 

*

 

Combien de temps resta-t-elle allongée sur le sol, le cerveau vidé de sa substance, les muscles engourdis ? Elle n’en avait pas la moindre idée.

Une église carillonna dans le lointain. Au moins était-elle quelque part.

Elle se releva avec peine et pivota sur elle-même. Sordide, fut le premier mot qui lui vint à l’esprit. Une nuit épaisse et poisseuse baignait un coin de rue aux façades délabrées, encombré d’ordures. Il n’y avait plus trace de sa magie dans l’atmosphère. À la place, un relent âcre d’égouts, de légumes avariés et de hareng macéré lui agressa les narines. Un greffier feula dans la pénombre, avant de dégringoler d’un monceau d’immondices qui bordait une palissade pourrie. Étouffé par la brume, un écho indistinct de voix, de sabots et de robes bruissant sur le pavé tranchait le silence. Keina voulut appeler Lady, mais l’elfide semblait hors de sa portée mentale ; à moins que ses capacités télépathiques ne se fussent envolées également. Prise d’un soupçon d’angoisse, elle tenta d’exécuter dans le creux de sa main un glyphe enchanté, sans résultat. Son énergie s’était épuisée.

Elle releva la tête, désemparée, et plissa des paupières. Deux silhouettes déterminées venaient d’apparaître dans la lumière fade d’une lanterne à gaz suspendue au faîte d’une porte cochère. Le désarroi l’écrasa comme une masse. Elle était seule… et sans défense.

— Est-ce Nephir qui vous envoie ? souffla-t-elle d’un ton las, s’efforçant d’identifier les nouvelles arrivantes. Ordonnez-lui de me rendre ma famille. Amy, Gaétane et les enfants n’y sont pour rien.

— Dis donc, mais c’est qu’elle a de la suite dans les idées, la geignarde ! commenta celle de droite, un petit bout de femme au visage sec, son cou de cygne enserré dans un col montant qui lui donnait l’allure d’une autruche.

L’autre, une géante aux yeux perçants vêtue de bloomers amples qui flottaient au-dessus de ses chevilles, resserra sa prise sur le pistolet qu’elle brandissait à bout de bras.

— Ya plus d’famille, ma beauté. Le beau rêve est terminé. Nephir t’attend.

— Ça fait quoi d’apprendre que son monde n’était qu’illusion ? enchérit l’autruche avec un gloussement.

Dans la confusion de ses sens, Keina se surprit à appeler Luni à l’aide, mais à quoi bon ? Il ignorait probablement où elle se trouvait. Acculée, affolée, physiquement incapable de fuir, elle essaya de propulser une salve de particules en direction de ses assaillantes. Le chuintement misérable produit par ses phalanges occasionna une autre hilarité.

— T’excite pas, ma poulette ! clama la femme aux bloomers. C’que Nephir n’t’a pas enl’vé a foutu ton monde en l’air. T’es à sec, y paraît. À c’t’heure, tu n’as plus qu’la vie. Dommage pour toi. Fini les illusions !

Elle tira.

La balle déchira l’espace dans une détonation puissante, terriblement réelle, terriblement concrète.

Une larme sillonnant le long de sa joue, Keina ferma les yeux. Des ombres familières exécutèrent une danse macabre dans son esprit : Amy, Gaétane, Mary, Edward, Aaron, Joanna, Martha, William, Georgianna… suivis de Lynn, Ekaterina, Cinni, Pierre, Olga, Erich, Anna-Maria, Atalante, Dora… et Luni, en dernier, son regard bleu accroché au lointain.

Pardonnez-moi…

Puis les ténèbres l’engloutirent. 

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vefree
Posté le 12/11/2010
Naaaaaaaaaaaaaaaaooooooooooon !!!!!!!! non, c'est pas possible ! Pas elle, hein, pas elle ?!
Tu n'as pas fait ça, là, maintenant, alors que l'histoire commence à peine... Non, c'est sûr, elle va revenir. Elle est juste blessée. C'est juste pour la rendre inconsciente, juste pour l'emmener auprès de Nephir qui va lui en faire baver des ronds de chapeau, mais elle est vivante. Oui, oui, elle va vivre.
Je me persuade comme je peux, hein. Vilaine auteur qui attente, elle aussi à la vie de son héroïne principale...
Alors, tout ça n'était qu'illusions... Le monde qu'elle affectionnait tant, qui semblait si bien fonctionner et vivre en harmonie. N'est-ce pas plutôt un sortilège maléfique destiné à la pousser dans ses retranchements et lui faire remplir son rôle au sein du Royaume ? Dans quelle mouise s'est-elle mise !! Mon dieu ! Elle n'a averti personne au Royaume et voilà que de l'autre côté, plus rien n'existe du Londres qu'elle connaissait. Elle est perdue. Autant dire que c'est plutôt mal emmanché pour elle, désormais.
Je n'ose aller lire le dernier chapitre en ligne. J'ai peur de me trouver avec une histoire haletante mise en suspend pour cause d'écriture en cours... aie ! Mais c'est si palpitant, si prenant !...  
Je retourne à mes occupations IRL, mais je promet de revenir malgré ce que j'ai dit. Cette histoire est trop bonne...
Biz Vef' 
Keina
Posté le 12/11/2010
Bon, j'imagine que tu as été au moins rassurée sur un point par la suite... :) Oui, Keina vivra, même si... peut-être aurait-il mieux fallu...
Le sortilège de Nephir est particulièrement vil, c'est clair. Mais il est bien réel, le monde dans lequel vivait Keina n'a jamais existé. C'est une réalité avec laquelle elle va devoir apprendre à vivre, aussi difficile que ce soit. Autant dire que pour elle, c'est une nouvelle étape dans sa vie qui s'annonce. Une émancipation forcée...
Je suis ravie d'avoir réussi à te tenir en haleine, en tout cas.
Bises 
Seja Administratrice
Posté le 26/08/2010
Et voilà, j'arrive au bout des chapitres que j'ai déjà lus. Après celui-ci, je me lance dans de l'inédit :P<br /><br />Retour à Londres dans la famille adoptive. Chouette à première vue. On découvre beaucoup plus le monde "ordinaire" qu'on n'avait que survolé dans le chapitre 1. Et je dois dire que, wah, tu m'as impressionnée. Tous ces détails, toutes ces petites choses résultant de recherches, c'est superbe. Ca rend parfaitement l'ambiance de la fin du XIXe, début du XXe siècle, du moins l'idée que je m'en fais. Ce progrès qu'on n'arrête pas, ces mouvements féministes qui commencent à prendre de l'importance. C'est du beau travail, rien à dire.<br /><br />Sauf que c'est pas tout beau, tout rose. On sent quelque chose qui se trame derrière, une menace, presque imperceptible, mais pourtant bien présente. D'abord, Mary qui dit à Keina de partir (au passage, la description que tu en fais colle bien à son nom - Cooper :D), puis Keina qui se sent de plus en plus fatiguée, épuisée par la magie qu'elle doit contenir. Et il y a aussi le passage avec Gaetane où Keina lui confie que Luni était amoureux de sa mère qui m'a semblé louche. Il vient quand même de lui avouer qu'il l'aime, non ? Que sa mère n'était qu'une amie. Et elle a eu l'air de le croire, du coup, pourquoi elle ressert la théorie de "Luni amoureux d'Akrista" ?<br /><br />Et finalement, on bascule. Tout le monde qui entoure Keina s'écroule, s'éfiloche. Les réactions de ses proches semblent quand même assez vraies, du coup, je me suis demandée si c'était vraiment qu'une illusion ou si ça avait quand même des répercussions sur la réalité réelle. Et ça m'a surpris (mouais, bon, c'est un euphélmisme) de voir Georgianna parler de Nephir oO Ou alors, c'est juste la peur de Keina de voir ses proches se laisser corrompre par la magicienne qui ressort là.<br /><br />Et on se réveille dans un endroit inconnu en compagnie de deux femmes pas trop amicales. La phrase de la deuxième m'a perturbée (oui, je suis un être très perturbable) - comme quoi toute sa vie ne serait qu'illusion oO C'est possible que Amy et cie n'aient *jamais* existé ? oO Et tout ce qui s'est passé au Royaume aussi ? oO Nooon, c'est quand même pas possible ça, tu l'as dit toi-même que le Royaume était bien réel. Mais pour toute la famille londonienne, tu me fiches le gros doute, méchante -_-<br /><br />Bon, bah, du coup, j'enchaine sur le dernier chapitre. J'espère que l'écriture du suivant avance bien bien, qu'elle court même !
Keina
Posté le 26/08/2010
Merci Sejounette ! Bah, tous ces détails, ça a un peu été chipé ici ou là, je ne me suis jamais lancée dans une étude "sérieuse" de la société Edwardienne. J'aurais bien aimé m'appesantir un peu plus sur les détails "sombres" des suffragettes, mais vu qu'on était au début du mouvement, c'était un peu difficile. Mais au final, j'ai appris que ce n'était pas forcément uniquement grâce à elles que les femmes ont obtenu le droit de vote en Angleterre, et qu'elles ont fait autant de mal que de bien au mouvement féministe. Mais ce côté un peu extrême collait bien avec le personnage tout feu tout flamme d'Amy. Je me suis donc permis quelques viols de l'histoire, puisqu'il n'y a pas eu de répercussion du mouvement à Londres cette année-là... (ça vient plus tard dans la réalité) ^^'
Quant à la conversation de Keina et Gaétane... c'est elle qui est butée, pas moi ! :P Quoi, tu ne me crois pas ? Bon, d'accord, c'est peut-être un peu forcé sur ce coup, et elle oublie un peu vite les confessions de Luni. Mais il faut savoir qu'elle lui en veut toujours à mort, et qu'elle mélange un peu tous ses motifs de ressentiment. Je verrai si je ne change pas la teneur de la conversation à la réécriture... je voulais juste montrer une petite scène intime entre les deux amies, c'est tout. :)
Eh eh, ça va, ton doute s'est dissipé vite, heureusement. Pas forcément pour le mieux, mais bon... :) Au moins tu as su très vite à quoi t'en tenir ! ^^
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