Cher journal,
Trop jeune. Je suis encore trop jeune pour entrer officiellement dans la SS. Malgré mes seize ans accomplis, malgré mon excellente condition physique et ma grande taille, ce n’est que lorsque j’aurai effectivement dix-huit ans que je pourrai manifester ouvertement son désir d'entrer dans la SS.
Je sais déjà comment cela va se passer et je n’ai pas peur. Je suis le meilleur de mon groupe, je mesure plus du mètre soixante-dix requis, mes cheveux sont blonds et j’ai les yeux bleus.
J’ai déjà l’argent nécessaire pour payer mon uniforme : je me suis proposé pour effectuer divers travaux chez des membres du parti et ils ont récompensé mes efforts en me donnant un très bon salaire.
Papa m’a dit que sur cent hommes qui soumettent leur candidature, seuls une dizaine d’entre eux sont retenus. Pas plus. Je sais que le dossier politique des parents, des frères et sœurs est examiné et que l’arbre généalogique de la famille est soigneusement vérifié jusqu'en 1750.
Je n’ai rien à craindre : nous sommes de purs Allemands, au passé irréprochable.
Et puis je ne redoute pas l’examen sportif : je suis très bien entraîné, personne ne peut me battre à la course et les combats d’homme à homme ne me font pas peur.
Nous avons eu une conversation papa et moi il y a quelques jours au sujet des élections législatives que le parti a remportées cet été. Je m’attendais à ce qu’Adolf Hitler soit nommé chancelier, mais le vieux impotent qui gouverne notre pays refuse toujours. Il a même osé qualifier Hitler de petit caporal bohémien qui a tout juste l’envergure pour faire un ministre des Postes. Quelle honte !
Papa a raison : il est temps que les choses changent en Allemagne. Au moins c’est l’un des nôtres qui préside le Reichstag.
Oh, j’allais oublier ! Nous allons très bientôt recevoir la visite d’Adolf Hitler dans nos locaux. Je suis vraiment très impatient ! Papa dit que je pourraimême lui parler quelques minutes en privé.
Werner.