De la démocratie en Amérique, tome 1, Alexis de Tocqueville (partie 1)

Par Sabi
Notes de l’auteur : Réflexions, analyses et prises de conscience engendrées par la lecture de Tocqueville.

Tocqueville est l'auteur qu'il faut avoir lu si l'on veut comprendre le système dans lequel on vit. C'est grosso modo ce que j'ai entendu dire Philippe de Villiers dans un de ces interviews. Ayant beaucoup de respect pour la culture, l'érudition, la réflexion, et surtout la plume de cet homme, c'est ainsi que je me suis mis en tête par une belle journée printanière qu'il me fallait à mon tour plonger dans la tête de l'aristocrate normand du début XIXe siècle.

Et à n'en pas manquer, De Viliers ne m'avait pas menti.

Tout d'abord, précisons bien une chose : je n'ai pas fini de lire Tocqueville. J'ai achevé plus des 3/4 de son premier tome, c'est tout. Ce n'est pas suffisant pour faire une critique de la pensée de ce philosophe politique. Et là n'est pas mon but de toute façon. Je n'en vois pas l'intérêt. 

En revanche, c'est suffisant pour alimenter mes propres réflexions, analyses de notre monde contemporain, et avoir eu quelques prises de conscience salutaires. Et le but de ce feuillet est de vous en faire part, si tant est que cela en intéresse certains.

 

Comme l'annonce le titre de l'ouvrage, tout va tourner autour de la démocratie. Et commençons par cela. Avant de lire Tocqueville, j'étais, un peu comme tout le monde, à baigner dans le régime politique de la démocratie apparente depuis mon plus jeune âge. Je considérais ça comme allant de soi. Eh bien figurez-vous que non. Pour Alexis (Tocqueville, mais Alexis est plus rapide et facile à taper sur mon clavier), cela ne va pas de soi.

J'ai été fort surpris, étonné, éberluhé même, de voir qu'à une époque de notre Histoire, la démocratie posait tout un tas de problèmes et de questionnements dans son application. Comprenons-nous bien. Aux yeux des contemporains d'Alexis, la démocratie contemporaine est un fruit américain, et non pas européen.

La France de 1830 est encore une monarchie, comme elle l'a été pendant plus de dix siècles. Bref, la monarchie est un système politique traditionnel qui a fait ses preuves, qui est sécurisant pour beaucoup de monde en France à l'époque, et il n'est guère étonnant que beaucoup veuillent y rester. Car la démocratie... c'est l'inconnu ! C'est la révolution ! La révolution qui vient de causer presque trente ans de guerre en Europe ! Bref, la démocratie, ça fait peur. Et beaucoup de gens censés se demandent si la démocratie peut fonctionner en France, ou non.

Ainsi, l'un des buts d'Alexis avec son ouvrage est de prouver que la démocratie est théoriquement possible en France, malgré plusieurs siècles d'un gouvernement aristocratique. Dans son premier tome, il passe beaucoup de temps à décortiquer le système démocratique américain, ce pour montrer comment il fonctionne, et surtout d'où il provient. Il montre quelles qualités propres aux anglo-américains, comme ils les appellent, a pu produire un système politique pareil.

Suit la comparaison avec l'esprit qui règne en France, et le constat suivant : il est impossible de reproduire à l'identique le système démocratique américain en France. Notamment car les Américains sont habitués et éduqués à exercer leurs droits démocratiques jusque dans les moindre détails de la vie publique de tous les jours ; tandis que les Français sont habitués à un système hiérarchique pyramidal où, notamment, le supérieur surveille constamment son subordonné. Bref, l'Américain vit depuis des décénnies dans un système de pensée égalitaire, tandis que le Français vit dans un système de pensée aristocratique.

Pourquoi j'en parle ? Eh bien parce qu'en lisant ceci, je me suis rendu compte que c'était toujours ainsi de nos jours. Je m'explique.

Encore de nos jours, en France, il est commun dans le service public, d'avoir un supérieur hiérarchique qui te chapeaute et te dit ce que tu dois faire jour après jour. Ce même supérieur en a un lui-même, et ainsi de suite. Tout cela jusqu'au plus haut niveau de l'État qui est le président. Tout est encore très centralisé, et la crainte des inspections et des contrôles est bien présente dans la mentalité du fonctionnaire d'État français. 

Cette hiérarchisation et centralisation du pouvoir, si typiquement français, vous serez peut-être surpris d'apprendre que c'est là la caractéristique d'un État monarchique. Et cette peur de l'inspection, du contrôle du supérieur qui rend le fonctionnaire souvent servile face à l'autorité, croyez-vous que c'est là la caractéristique d'un régime démocratique ? Peu importe qu'il existe des contre-pouvoirs comme les syndicats. Ce n'est pas ça qui est important. Ce qui est important, c'est la présence, ou non, de cette peur de l'inspection et du contrôle du supérieur que je vois et ressens chez mes collègues professeurs.

Tant que cette peur existe de façon active dans le coeur du fonctionnaire français, cela prouve que notre système est resté monarchique dans son fonctionnement. Combien même nous nous disons une démocratie.

Les paroles et les postures sont du vent pour moi. Nous savons tous très bien que ce qui compte au-delà des mots et des apparences, c'est ce qui se cache derrière. Et derrière la façade démocratique de la France se cache toujours le fonctionnement hérité de la tradition monarchique.

Après tout, les habitudes comportementales engendrées par un système politique vieux de dix siècles au bas mot (plus même si l'on remonte jusqu'à l'Empire romain) ne peut pas disparaître parce qu'on a fait une rénovation de façade qui se maintient - de façon discontinue ! - depuis à peine plus de deux siècles. 

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