Chapitre 62 : Excursion (2)

Notes de l’auteur : Bonne lecture à tous ! =^v^=

Mathilde ne comprit qu’elle criait que lorsque son assaillant lui plaqua la main sur la bouche. L’adrénaline pulsa dans ses veines. Elle mordit de toutes ses forces ces doigts étrangers. Son agresseur poussa un juron étouffé et se dégagea violemment, arrachant son poignard de la paroi.

En retombant sur ses pieds, le choc se transmit dans tout son corps et irradia son flanc entaillé. Ses genoux faiblirent sous la vague de douleur. Elle glissa le dos contre le mur, cherchant son souffle. Son assaillant leva de nouveau son arme.

Mathilde esquiva la lame filant en direction de sa tête, qui crissa contre la pierre avec des étincelles. Elle plongea sous la garde du Finkadien et lui assena le plus violent coup d’épaule qu’elle put. Le bref déséquilibre de son assaillant lui permit de lui voler une dague qui pendait à sa hanche.

Elle recula aussitôt vers l’échelle, sa nouvelle arme levée en direction des deux Finkadiens. Ses doigts ensanglantés se crispaient sur le manche, agités de tremblements. Elle était seule, mais elle n’était plus sans défense ! Elle s’accrochait à cette idée comme à une bouée de sauvetage pour oublier la douleur qui lui ravageait les côtes à chaque respiration. Blessée comme elle était, il n’était plus question de grimper à la surface… Si elle arrivait à les distraire, elle pourrait peut-être fuir par les égouts avant qu’ils ne puissent la rattraper ? Elle ne parvenait pas à croire à sa propre hypothèse. Le Finkadien qui inspectait le passage secret cracha une envolée de mot si fortement marquée par son accent que Mathilde le comprit à peine.

— Qu’est-ce que tu fabriques ? Dépêche-toi d’en finir !

L’autre lui répondit d’une voix féminine plus acérée encore.

— Je n’en ai pas pour longtemps, occupe-toi du tunnel.

Elle rejeta le capuchon de sa cape qui la gênait. Une chevelure composée d’une multitude de tresses baguées d’or ainsi qu’un visage à la peau brune apparurent alors complètement dans la lumière orangée de la lampe à pétrole.

Mathilde découvrit des traits fins et aigus qui auraient été harmonieux sans l’expression mauvaise qui les froissait. Cette femme, cette Finkadienne, l’avait poignardée sans la moindre émotion et s’apprêtait à terminer le travail. Tout dans sa tenue semblait teinté et taillé pour la fondre dans l’obscurité, et seuls ses iris ambre ressortaient et dirigeait sur elle une lueur satisfaite, triomphante. Elle avançait, sa lame bien en main, avec une démarche flottante qui ne ressemblait à aucun art de combat qu’elle avait étudié.

Impossible de prédire de quel côté elle allait se fendre. Les sens de Mathilde étaient en alerte, tentant de capter le moindre signe annonciateur d’une attaque. Ses yeux entraînés reconnaissaient la différence de force qui la séparait de ses adversaires. Elle savait qu’elle n’avait aucune chance. Elle chancela, une main pressée contre sa plaie, l’autre agrippée à la dague. La Finkadienne se préparait à la frapper et ses jambes la lâchaient. Elle ne pourrait pas…

Un nouveau crissement de métal lui glaça le cœur et elle releva la tête vers la bouche d’égout. On venait de l’ouvrir et un rond de pluie crépita sur le pavé dans le dos de Mathilde. L’instant d’après, une haute silhouette encapuchonnée sauta au travers, se tenant à peine aux barres verticales de l’échelle et atterrit dans une gerbe d’éclaboussures sur le sol du souterrain. Il était gigantesque, ruisselant de partout sous sa cape qui le plongeait dans l’obscurité. Il était un rempart humain brusquement érigé entre elle et sa seule échappatoire. Elle était encerclée.

Mathilde recula précipitamment et tourna sa dague de fortune vers le troisième larron dégoulinant de pluie. Il la lui arracha des mains avec la vivacité d’une vipère, comme par réflexe. Un gémissement de douleur et de désespoir lui échappa et elle se hâta de battre en retraite. C’était sa seule arme, sa seule protection… Sans possibilité de fuite ou de force pour se battre, la peur l’emprisonnait comme une camisole. Ils allaient la tuer. Restait à savoir qui du colosse ou de la femme aux yeux ambre frapperait le premier.

Mais celle-ci ne bougeait plus. Elle avait même reculé de plusieurs pas. Elle fixait le nouveau venu avec un regard méfiant, ses bras levés en une position défensive…

Avant que quiconque ait pu réagir ou arriver à un consensus, l’homme encapuchonné se précipita vers Mathilde. D’un geste souple, il l’attrapa par la taille, lui arrachant un cri, et la jeta sur son épaule. Puis, il fit demi-tour et courut de toutes ses jambes dans la direction opposée au passage secret.

« Il… il ne me tue pas ? » bafouilla-t-elle intérieurement, désorientée.

Les mains de l’inconnu étaient fermes autour d’elle, sans la moindre once d’animosité. Il semblait n’avoir qu’un but : s’éloigner du tunnel caché et des Finkadiens. Peut-être… peut-être qu’il n’était pas avec eux ? Il la sauvait alors ? Ses yeux s’emplirent de larmes tandis que les grandes jambes de l’inconnu augmentaient toujours plus la distance entre eux et ses attaquants. Elle lui devait la vie.

Brinquebalant sur son dos, Mathilde croisa le regard de ses deux assaillants, debout derrière le rideau de pluie. Ils ne prirent même pas la peine de les poursuivre. Ils haussèrent les épaules et s’engouffrèrent dans le passage secret.

Le soulagement de Mathilde fut balayé par une foudroyante réalisation.

Ce n’était pas elle qu’ils voulaient.

C’était l’accès à la Cité Impériale.

Ils disparurent dans le dédale obscur. L’inconnu s’enfonçait dans les égouts et semblait emprunter les galeries les plus aléatoires possibles, comme pour perdre leur trace. Sans s’arrêter de courir, il la transféra de son épaule à ses bras et plaqua sa paume contre son flanc pour compresser sa blessure.

À mesure que le danger s’éloignait, la brûlure que ressentait Mathilde s’était muée en une douleur sourde dont son esprit n’avait que faire. Pour une fois, elle n’avait pas l’énergie de se questionner sur ce qui venait de lui arriver ou ce sauvetage miraculeux.

Le désastre de son expédition l’accablait jusque dans sa chair et se projeter dans l’avenir suffisait à lui donner la nausée. La seule interrogation que s’autorisait son esprit était si l’inconnu allait continuer de l’aider ou pas. Son capuchon dissimulait son expression, mais à la manière dont il la serrait dans ses bras, il n’avait pas l’air de lui vouloir du mal.

Enfin, il sembla juger s’être assez éloigné et cessa de courir pour s’orienter. Mathilde en profita pour balbutier quelques mots à demi audibles, tant elle peinait à retrouver son souffle.

— Il faut… il faut les empêcher de prendre le tunnel…

— C’est bien le moment de se soucier d’un détail pareil ! Tu as failli te faire tuer, bon sang !

Le cœur de Mathilde s’emballa. Cette voix… Elle ne la connaissait que trop bien. Mais c’était impossible ! Elle tira sur le capuchon trempé de son porteur et révéla un visage balafré et un regard furieux.

— Rok ! s’exclama-t-elle dans un souffle. Qu’est-ce que tu fais là ?

Sidérée, elle leva sa main et sursauta lorsqu’elle rentra en contact avec la joue du géant. Elle n’arrivait pas à y croire, à comprendre ce que ses yeux lui disaient. Lui ? Ici ? Comment ? Elle devait délirer. Mais pourquoi son esprit irait-il imaginer Rok ainsi, affublé de vêtements d’ouvrier encore ruisselants et enveloppé dans une pèlerine qui ressemblait fort à la sienne ?

Le garçon n’avait en tout cas pas l’air amusé du tout par ses divagations et lui aboya à la figure d’une voix enrouée.

— C’est moi qui devrais de poser cette question ! Comment as-tu fait pour sortir du Collegium ? Tu m’as suivi ? Ou alors…

Il se mordit la lèvre et la serra davantage contre lui.

— Nous verrons ça plus tard. Il faut d’abord s’occuper de ta plaie.

— Elle n’est pas si profonde, marmonna Mathilde sans force, je survivrai… Mais si ces Finkadiens s’introduisent dans la Cité Impériale…

— Tu préfères te vider de ton sang ? La coupa-t-il en la foudroyant du regard.

Il s’arrêta dans une alcôve de pierre plus sèche que le reste des sous-terrains et l’allongea sur le sol pavé.

Se débarrassant de sa pèlerine trempée, il saisit sa gourde et se pencha sur elle. Puis il souleva délicatement sa chemise, collée à sa peau par le sang. Mathilde tressaillit et Rok eut l’air encore plus mal à l’aise. Il termina néanmoins de dégager la plaie.

— Désolé, marmonna-t-il en croisant brièvement son regard fiévreux, ça ne va pas être agréable.

Ses gestes avaient beau être stables et efficaces, Mathilde ne put retenir sa voix, qui résonna dans les souterrains. Sans bandages, ni aucun matériel médical à disposition, il sacrifia la doublure en coton de sa pèlerine et se servit des lambeaux après avoir rincé abondamment sa blessure. En ripant contre ses côtes, la lame avait manqué les organes vitaux, Mathilde avait donc échappé au pire. Cependant la plaie restait profonde et aurait besoin d’être recousue. Au moins, le saignement était-il endigué.

Rok essuya son visage couvert de sueur, étalant sur sa joue sans s’en rendre compte le sang qui tachait ses mains. Il était livide, à croire qu’il était celui qui avait été poignardé. Il avait été si efficace, et pourtant, maintenant que Mathilde était pansée, des fissures craquelaient son masque de sérieux.

— J’ai fait ce que j’ai pu, souffla-t-il, mais il te faut des points de suture…

Mathilde ferma les yeux. Ses mots lui parvenaient étouffés, comme si elle s’enfonçait dans un lac à l’eau épaisse. L’incendie avait été remplacé par un blizzard qui gelait peu à peu chacun de ses membres.

— Hey ! Mathilde ! Reste consciente !

Elle ne l’entendait plus. Le lac était profond et si noir… tout disparaissait dans son sein si froid et pourtant si calme. Elle aurait aimé y demeurer blottie, loin de la douleur.

Un éclair déchira son cocon et la força rouvrir les yeux. Rok l’avait redressé en position assise et la soutenait dans ses bras, deux doigts posés sur sa carotide. La panique dans son œil valide donna un frisson à Mathilde, qui repoussa sa main avec un sourire faible.

— C’est bon, c’est bon… mon cœur bat. C’est le contrecoup qui se fait sentir. Laisse-moi respirer.

— Tu ne dois pas t’endormir, insista le géant. Pas avant que je ne t’amène à un médecin !

Mathilde secoua la tête, geste qu’elle regretta aussitôt, car il lui souleva l’estomac.

— Pas de médecin. Nous ne sommes pas censés être hors du Collegium. Si on nous trouve ici, Artag sera…

Elle se mordit la lèvre, mais il était trop tard. Rok écarquilla les yeux, la surprise s’étalant sur son visage balafré. Elle poussa un juron en son for intérieur. Comment rattraper une gaffe pareille ? Rok ne pourrait pas comprendre le favoritisme de son Tuteur, qu’il tenait en si haute estime… Elle ouvrit la bouche avec la moitié d’une excuse en tête, mais le garçon la prit de vitesse.

— Je le savais ! s’écria-t-il. Ce vieux renard ! Je savais qu’il me cachait quelque chose !

— A-Attends ! balbutia Mathilde. C’est un peu plus compliqué que ça en a l’air…

— Alors toi aussi, tu n’en pouvais plus ?

Mathilde papillonna des paupières.

— Pardon ?

Rok poussa un long soupir et l’adossa au mur. Il n’y avait pas d’énervement dans ses traits, seulement un épuisement las. D’un geste souple, il sortit un petit objet en argent de sa poche et le montra à Mathilde.

C’était un écusson représentant un renard, enroulé autour d’une clef. Dans un même mouvement, il sortit de son col une chaîne où pendait une clef, identique à celle logée dans le portrait que Mathilde portait autour du cou. Elle contempla avec des yeux ronds ces deux objets dont elle pensait posséder le seul exemplaire.

— Comment… Enfin, quand Artag te les a-t-il donnés ?

— Deux mois après notre arrivée au Collegium.

— Deux mois ! s’exclama-t-elle, indignée malgré elle. Si tôt ! Pourquoi ?

Elle qui pensait être la favorite… Le garçon détourna le regard, les sourcils froncés.

— Je supporte mal d’être enfermé.

Mathilde se retint de le frapper par égard pour sa nausée. Au lieu de ça elle agrippa sa chemise en penchant la tête en arrière pour croiser son regard.

— Ne me prends pas pour une idiote, dit-elle les dents serrées. Vu ce qu’il a fallu que je traverse pour qu’Artag m’offre l’accès à son passage, je doute qu’il te l’ait donné parce que les grands espaces de ton île te manquaient !

Elle soutint son regard avec insistance. Rok la scruta plus attentivement que d’habitude, une ombre d’incertitude voilant son visage. Mathilde se renfrogna, blessée par son silence.

— C’est si secret que ça ?

Rok pinça les lèvres.

— Ce n’est pas vraiment un secret… c’est surtout embarrassant.

— Artag t’a laissé sortir pour quelque chose d’embarrassant ?

Le ton de Mathilde était sans appel. Elle exigeait une vraie réponse. Son sentiment de trahison était sans doute injuste, puisqu’ils étaient dans une position similaire, mais elle n’avait pas la tête à se montrer raisonnable. Sa blessure rongeait ce qui lui restait de patience et elle aurait fait n’importe quoi pour s’en distraire. Le géant se frotta le cou en fixant un point dans l’obscurité.

— C’est à cause des Mauves, dit-il à mi-voix.

Mathilde hocha la tête. Enfin, il abordait le cœur du sujet ! Jusque-là, rien de surprenant à ce que les fauteurs de troubles du Collegium soient en tort. Elle était même étonnée qu’il ne les mentionne pas plus facilement. Il continua pourtant la tête tournée vers les profondeurs des égouts. Il avait l’air gêné au point de ne plus vouloir la regarder dans les yeux.

— Leur charisme me rend fou, et Fineas s’en est très vite rendu compte. Il ne manquait pas une occasion de plier mes émotions à sa volonté. Pour contrôler ma peur, ça va, mais la colère est une autre de paire de manches.

Rien qu’en prononçant le nom du Mauve, ses muscles se tendirent et un accent de rage s’ajouta au ton de sa voix.

— À chaque cours de Lady Tymphos, il m’envoyait ses maudites suggestions pour me faire craquer devant elle. Je ne pouvais pas m’éloigner pour me calmer, ou même rester concentré sur le cours, et je crois que la harpie le savait. À chaque cours, pendant des heures… heureusement, il ne peut pas maintenir son pouvoir en continu, sinon j’aurais rapidement explosé.

— Pourquoi ne nous as-tu rien dit ? À nous trois, nous aurions pu…

Elle s’arrêta d’elle-même. À ce moment de l’année, ils possédaient à peine les prémices d’une harmonie d’équipe. Rok lui adressa une moue sarcastique et enfonça son menton dans le creux de sa paume.

— Je n’étais pas très disposé à votre égard à l’époque, et Galis n’a rien arrangé.

— C’est pour cela que vous vous êtes battus ?

Rok hocha la tête. La honte se lisait plus facilement sur son visage à présent. Il passa ses mains dans ses cheveux pour se soustraire au regard scrutateur de Mathilde.

— Galis m’a vu m’emporter contre Fineas, après un cours. Je crois qu’il a eu peur que je le fracasse contre un mur et il s’est interposé. Honnêtement, après ces quatre heures sous l’influence saccadée du charisme de Fineas, j’étais à deux doigts de le faire. J’étais si aveuglé de colère que je ne me souviens pas bien de notre échange ni de ce que j’ai dit à Galis. Probablement un concentré de haine envers les Nobles.

Il jeta un coup d’œil dans la direction de Mathilde, comme pour vérifier qu’il ne l’avait pas offensée. Elle l’encouragea d’un sourire un peu bancal, il lui était difficile d’ignorer la douleur dans son flanc au point de la chasser de son visage.

— Bref, il l’a mal pris, j’ai craqué, et nous en sommes venus aux mains. Fineas avait filé chercher Lady Tymphos et c’est elle qui a mis fin à notre conflit.

Mathilde grimaça. Elle imaginait bien la scène. Rok n’avait aucun moyen de prouver que la colère ne venait pas de lui, et étant Katchynien, sa réputation de barbare le prédisposait à la violence. Rien qu’en se représentant leur altercation, elle sentait la morsure de l’injustice lui retourner le ventre et amplifier sa haine envers Fineas.

Après une pareille humiliation, n’importe qui aurait eu envie d’une promenade hors des murs oppressants du Collegium pour se changer les idées.

— Je suppose que cet incident a poussé Artag à te donner la clef vers la ville ?

Il acquiesça, le regard fuyant.

— Quand il a réussi à me faire cracher le morceau, oui.

La suite, Mathilde la devinait. Les « grands espaces » dont le géant lui avait parlé était ses bouffées à l’air libre pour échapper au charisme de Fineas et éviter d’exploser à nouveau.

— Je déteste m’emporter, souffla-t-il à mi-voix, comme pour lui-même. J’ai l’impression de devenir le barbare qu’ils disent que je suis.

Mathilde songea au coup de pied bien placé qu’elle avait donné à Fineas deux jours plus tôt et dodelina de la tête.

— Si s’emporter contre une enflure pareille suffit à faire de toi un barbare, j’en suis une aussi.

Elle raconta ce qui lui était arrivé dans la bibliothèque, et les événements qui avaient amené Artag à lui confier une clef du passage secret. Rok ne dit rien, mais serra les poings à s’en blanchir les articulations, à croire qu’il brûlait de s’en servir. Elle acheva en revenant sur l’incident qui lui avait coûté son violon et la dextérité de ses mains.

— Je comprends mieux pourquoi tu l’as autant amoché, dit-elle en se rappelant la figure tuméfiée de Fineas. Je me disais bien qu’il y avait quelque chose de personnel là-dessous.

Le visage du géant s’éclaira brièvement d’un plaisir vengeur.

— J’aurais dû faire ça plus tôt : depuis, il a arrêté son manège.

Se remémorant chacun de leur côté le moment où ils avaient rendu à Fineas la monnaie de sa pièce, ils échangèrent un sourire complice.

Soudain, une détonation déchira l’air et ébranla les parois des souterrains, coupant court leur instant de répit. Un souffle brûlant remonta les galeries et balaya l’alcôve de pierre, les plongeant au cœur d’un lourd nuage de poussière. Mathilde plaqua sa manche contre son nez, secouée d’une quinte de toux qui contracta ses muscles abdominaux et trempa ses yeux de larmes de douleur.

— Qu’est-ce que c’était ? gargouilla-t-elle avec un goût de salpêtre au fond de la gorge.

Rok bondit sur ses pieds sans lui répondre et la souleva à la hâte, un air de panique sur ses traits tirés. La serrant contre lui, il courut à travers le nuage de poussière, droit en direction du bruit. Mathilde enfouit son visage dans la veste du géant pour ne pas éternuer à nouveau.

Sans lui demander, elle savait où il allait… mais retourner au passage secret si tôt était une folie ! Les Finkadiens étaient peut-être encore dans les parages, et à deux contre un, il ne serait pas de taille à leur faire face. C’était bien pour cela qu’il avait fui la première fois, non ? Ils étaient trop fort pour eux, cela se voyait au premier coup d’œil. Pourtant, Rok courrait sans hésitation à travers l’obscurité, et Mathilde était peu à peu envahie par un affreux pressentiment. À mesure qu’ils se rapprochaient du passage secret, l’air se faisait plus chaud. Le calme était revenu dans les souterrains, les derniers échos de la déchirure s’étaient dissipés dans les galeries.

Puis, au détour d’une canalisation, le crépitement de la pluie sur le pavé, tombant à travers une bouche d’égout restée ouverte. Ils étaient de retour devant l’entrée du passage secret… ou du moins là où elle s’était trouvée plus tôt.

À la place, il n’y avait plus qu’un tas de gravas et de blocs de pierre. Une odeur âcre de poudre empestait l’atmosphère enfumée. Au-dessus d’eux, le tonnerre imitait le fracas de l’explosion, comme si l’écho s’était propagé jusqu’aux cieux.

Leur seul moyen de rentrer au Collegium venait de s’effondrer.

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Timie
Posté le 16/11/2022
Tu aurais pu appeler ces chapitres "l'excursion ou le début de la fin" ou alors "une excursion. Ça tourne mal"
Damn. "si j'aurais su j'aurais pas sorti" comme dirait l'autre !
Aryell84
Posté le 01/08/2022
OH MY GOD!!!!!
Je savais que ça sentait mauvais.... au moins ils sont deux, et le sauvetage par Rok était super réussi :) et je suis trop contente qu'Artag ait aussi donné la clé du passage à Rok, d'autant plus en apprenant ce que Fineas lui infligeait! Quel co**** celui-là! ça fait un bref moment de partage entre Mathilde et Rok, même si vite interrompu par l'explosion...
2 petites coquilles:
- « cracha une envolée de mot » → mots
- « sa seule échappatoire » → son seul
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