Chapitre 5 — Ben

« Si jamais l'envie te prend, n'hésite pas à passer à mon appartement. Par contre, je n'ai pas grand-chose à manger, mis à part mes pizzas à l'ananas que tu détestes tant. <3 »

Le dernier message que m'avait envoyé Rey. Et je lui avais juste répondu que j'avais besoin de prendre du temps pour moi, de rester un peu seul avec moi. Je m'étais habitué à cette solitude, mais à celle-ci.

Malheureusement, ce furent nos derniers échanges. Le lendemain, elle se pointait dans mon bureau et en était repartie, le visage transformé par la peur et les yeux à la limite de craquer.

Trilla m'interpella et je n'avais même pas remarqué qu'elle venait d'entrer dans mon bureau.

— Ben, la sécurité a dû bloquer une personne à l'entrée. Il souhaite te rencontrer, le tout agrémenté de nombreuses menaces. Je doute que ce ne soit très important, mais si jamais l'envie te tente, il est encore en isolement.

— Il n'a rien dit de plus ?

— Non. Seulement des menaces de mort.

Mon regard se posa un instant sur mon téléphone. Les messages de Rey étaient encore là. J'aurais peut-être mieux fait de les effacer, mais je ne pouvais pas m'y résoudre.

Je pris une longue inspiration et mis en veille mon téléphone, faisant comme si ce moment d'hésitation n'avait jamais existé.

— Très bien, je vais y aller...

Elle se proposa aussitôt de m'accompagner et en passant par l'ascenseur, on atteignit le rez-de-chaussée. On rejoignit alors la sécurité qui maintenait l'intrus dans une petite salle, coupée de toute fenêtre, isolée du reste des lieux.

— Je ne m'attendais pas à tomber sur le plus grand enfoiré du monde. Je ne pensais pas qu'il daignerait se pointer sous mes yeux.

Si la sécurité n'était pas à quelques centimètres de lui pour le retenir au moindre faux pas, il m'aurait probablement foutu en pleine gueule le poing qu'il fermait vigoureusement sous la table.

Voyant mon temps d'hésitation, Trilla prit les devants, toujours l'air sûr d'elle. Elle n'avait que rarement perdu le contrôle. Mais quand ça lui arrivait, c'était toujours bien dévastateur. Nous nous ressemblions un peu trop sur ce point, sauf qu'elle s'en sortait mieux que moi.

— Monsieur Ren n'a pas tout son temps à vous accorder, alors je vous prierai de formuler une demande bien plus précise à moins que vous ne vouliez que l'on contacte la police.

Elle croisa les bras et pencha la tête, comme une façon de lui dire "la balle est désormais dans ton camp".

— Vous avez tué ma fille ! Elle essayait d'échapper à ses harceleurs, mais juste parce que quelqu'un vous a donné une énorme somme, vous avez accepté de la mettre en danger !

C'était encore une de ses sales histoires dans lesquels Snoke nous avait embarqués. Certains d'entre nous n'avaient pas la moindre idée de ce qui tramait réellement derrière, mais nous avions suivi les ordres. Sauf que personne ne pouvait croire un simple "je ne savais pas", surtout quand quelques histoires de famille nous précédaient...

Puis sans compter les affaires plus légères où Snoke nous avait enfoncés pour l'utiliser contre nous. Ou encore qu'une grande partie de cette entreprise reposait sur des bases frôlant un peu trop l'illégalité. Mais l'argent était roi. Depuis que la police utilisait nos services, ils étaient prêts à faire pression pour qu'on maintienne nos offres.

— Vous n'êtes pas le premier ni le dernier dans ce cas, lança Trilla en posant ses mains sur la table.

Elle s'approcha dangereusement de son interlocuteur. À tout moment, il pouvait utiliser ce rapprochement pour lui enfoncer son poing en pleine gueule.

— Sachez que toute cette entreprise est couverte par des caméras de sécurité, y compris lors du moment de votre scandale.

Elle se redressa et sortit son téléphone de sa veste. Je pouvais remarquer qu'elle se connectait au système de l'entreprise.

— D'après les vidéos de surveillance et un peu de reconnaissance faciale, ce n'est pas très beau ce que je trouve à votre sujet. Vol à main armée deux ans auparavant... Casier vierge. Je suppose qu'on ne vous a toujours pas attrapé pour ça... Normal, il s'agissait d'un coin un peu plus pauvre de San Francisco.

Elle éteignit son téléphone. J'étais impressionné par la précision de ses gestes. Rien ne la trahissait. Elle savait comment dominer la situation et même la tourner à son avantage.

Il était évident que Snoke l'avait détruit parce qu'elle deviendrait une adversaire redoutable si jamais elle se retournait contre lui...

Quand Snoke avait sélectionné ses meilleurs atouts en nous, ce n'était pas des compétences ou des qualités, mais au contraire, la force qu'on pourrait avoir pour se retourner contre lui. Il avait juste couvert ses arrières pour ne jamais être brisé en deux.

— Je peux me montrer clémente avec vous. De notre côté, nous ne faisions que notre travail en ignorant qui était réellement notre client. Nous respectons la vie privée de nos clients. En revanche, un vol à main armée... C'est un crime.

L'homme fut soudainement désemparé et son poing se relâcha. Son regard se baissa. Même si les arguments de Trilla étaient fallacieux, ils étaient efficaces face à une personne qui s'était laissé prendre par les émotions.

— Virez-moi ça de là, ordonna-t-elle aux deux hommes qui avaient assuré la sécurité jusqu'alors.

Les interpellés prirent ce pauvre homme par les bras et le forcèrent à se lever et quitter la pièce.

— Ne me remercie pas, lâcha Trilla en se tournant vers moi, un sourire en coin.

— Ça risque de devenir de plus en plus fréquent, la prévins-je.

— Ne t'en fais pas, on en sait toujours plus qu'eux quoi qu'il arrive.

Son sourire se voulait rassurant, mais j'avais juste l'impression qu'il était naïf.

— Comment tu fais pour autant de détacher de tout ça ? Ce qu'on a fait dans cette entreprise, ça a toujours été mal...

— On n'a pas le choix.

Sa réponse était un peu trop ferme à mon goût. Malheureusement, j'allais devoir m'y faire. Snoke avait condamné notre destin jusqu'au bout.

— De toute manière, ce n'est qu'une histoire d'apparence... On finira par s'y faire.

Elle prit une brève inspiration. Un court instant où son masque se brisa. Ce masque greffé à sa peau, comme une seconde peau. Elle arrivait si bien à être quelqu'un d'autre. Mais je n'étais pas comme elle.

Ou sinon, je laissais aller pendant un bref moment ce truc qui me dévorait depuis longtemps. Puis je regardais le désastre, comme si une autre personne en était l'auteur. Mais une personne qui avait voulu se détacher de tout et qui n'avait plus réussi à surmonter ses propres émotions. Ce n'était pas le genre de personnalité avec laquelle on pouvait prétendre être quelqu'un de fort.

Alors, pendant un instant, tout me sembla vain. Et j'avais juste envie de me terrer dans un coin, de ne plus échanger le moindre mot avec personne. Ce genre de moment où j'allais juste m'allonger dans mon lit à regarder d'un air vide le plafond en espérant que le temps... passe.

Malgré le sourire de Trilla qui se voulait toujours plus rassurant, je n'arrivais plus à prétendre. Quelque chose avait pris le dessus et je n'en avais plus le moindre contrôle.

— Ne t'en fais pas, ça sera bientôt du passé ça.

Elle pourrait me dire n'importe quoi mais je n'y croirais toujours pas. Mon esprit était comme ailleurs, déconnecté de la réalité. Comme si quelqu'un avait pris ma place.

Cette sensation, je ne la connaissais que trop bien. Ça faisait même un bon bout de temps que je ne l'avais pas expérimentée de nouveau. Une sensation de vide qui prenait le dessus et où tout me semblait si éloigné. C'était surtout à l'adolescence que je l'avais rencontrée. Puis ça s'était calmé jusqu'à revenir quand Snoke m'avait pris sous son aile.

Mon attention se recentra sur la réalité quand Phasma entra dans la pièce, l'air à la fois ferme et inquiet.

— Nous avons trouvé une intrusion dans le système. A priori, rien n'a été endommagé, ce qui est assez étonnant comme intrusion.

— Je vais voir ça dans mon bureau...

Je quittai précipitamment la pièce, le souffle court. En jetant un bref coup d'œil aux alentours, mon regard se posa sur une silhouette de l'autre côté de la rue. Il avait beau avoir un chapeau pour masquer une partie de son visage, il restait néanmoins facilement identifiable.

Mon ancien maître. Mon oncle.

Luke Skywalker.

Et une simple expression sur son visage pour me prévenir, juste pour me dire "On se reverra".

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Jess Swann
Posté le 14/11/2020
Ahhhhh Luluke ! Enfin ! J'ai beaucoup aimé ce chapitre qui se centre sur Ben, hâte de le voir face à Luke
Trilla m'intrigue de plus en plus et elle est hyper proche de notre Ben ^^
MissRedInHell
Posté le 17/11/2020
Et ce n'est que le début ! :D
J'ai plein d'idées pour développer Ben dans les prochains chapitres :3

Pour Trilla, je viens tout juste de finir un chapitre un peu plus centré sur sa relation sur Ben, mais clairement pas évident vu où je commence à me diriger avec elle héhé :')
ManonSeguin
Posté le 03/11/2020
Trilla cette femme beaucoup trop badass pour rester en tant que "second" de Ben...
Et le fameux "On se reverra" mon dieu ! Harper ! J'imagine tellement Luke avec un petit sourire en mode "Je sais que tu sais" :D Tellement hâte de voir jusqu'où Ben va aller/s'enfoncer pour cette cause... (VA VOIR REY BON DIEU)
MissRedInHell
Posté le 03/11/2020
Ah mais Trilla, je la <3 Et j'ai trop hâte d'encore plus la développer <3

Hihi :D C'est tellement le bordel partout et ce serait trop simple s'il allait la voir maintenant huhu #teamSadique c:
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