Chapitre 4 - La tempête (1)

Les jours passèrent, monotones. Depuis leur conversation, Sinead surprenait régulièrement son frère à fixer l’horizon avec une forme d’impatience. Depuis que l’idée d’aller explorer les dunes avait été évoquée, c’était comme si cela le démangeait. Sinead pouvait le comprendre. L’inaction avait sa part d’angoisse. Léna aussi observait les dunes mais elle ne lui offrait pas la même attention. Il y avait une part d’elle qui espérait voir des inconnus en surgirent et une autre qui le craignait. Car Léonard avait raison. Ce qui pouvait venir à eux ne serait pas forcement bien intentionné. Ses traits s’assombrissaient et plus les jours passaient, plus elle semblait à cran. A vrai dire, il n’y avait que Jewel qui semblait voler loin au dessus de toutes ses considérations.

Sinead ne savait pas quoi penser. Une partie d’elle voulait explorer ce désert comme si cela n'était qu'une simple promenade. Sa curiosité mêlée à sa naïveté n’étaient pas les meilleures conseillèrent à l’heure actuelle, elle le savait bien. Mais qu’il était difficile de rester là, à espérer que les réponses leur viennent. Et pourtant, comment pouvait-elle prétendre à vouloir s’enfoncer entre ses dunes alors que la peur lui tordait les tripes dès qu’elle croyait percevoir un mouvement à l’horizon ? Elle ne pouvait se défaire de ce sentiment poisseux qui lui collait à la peau, ce sentiment désagréable d’aller à l’avant du danger. Sinead se prit la tête dans les mains. L’oasis était un véritable havre de paix. Ils pouvaient y rester longtemps sans être inquiéter. Ils pouvaient s’y oublier, faire comme si tout était normal, comme si tout cela n’était qu’un mauvais rêve et que bientôt, ils se réveilleraient. Simplement.

Sinead avait longuement envisagé la possibilité qu’ils soient morts et que tout cela soit une sorte de monde d’après. C’est ce qui, à l’inverse de Léna, lui donnait cette facilité à aller de l’avant. Après tout, s’ils étaient morts… Elle soupira. Elle avait besoin de se rafraichir les idées. Elle attrapa une serviette et descendit jusqu’à la surface argentée et parfaitement lisse de l’eau. Il y avait une grande bassine installée dans un recoin à l’abri de regard, entourée de verdure. Alors qu’elle approchait, elle découvrit Jewel en train de verser un grand seau d’eau dedans.

- On dirait qu’on a eu la même idée.

Sinead posa sa serviette et prit le deuxième seau pour aider son amie à remplir la bassine. Cet ingénieux système permettait de garder la pureté de l’oasis. Une fois fini, l’eau utilisée était déversée aux pieds des buissons. Jewel avait déniché un savon artisanal dans les malles dont l’odeur se rapprochait fortement du beurre de karité. Son amie se dévêtit sans pudeur et plongea dans l’eau froide avec un frisson, poussant un soupir d’aise en s’allongeant. Sinead vint s’asseoir à côté avec un regard narquois.

- Prend ton temps surtout !

Jewel lui tira la langue.

- J’y compte bien !

Sinead rigola. Son regard tomba sur l’intérieur du bras gauche de Jewel. Elle caressa la peau marquée à l’encre noire. Il y a à peine un mois, Jewel s’était offert son troisième tatouage. Le dessin était délicat, tout en finesse et en forme géométrique. Une ligne stylisée parcourait l’intérieur du bras gauche, du poignet jusqu’au coude et était ornée en son milieu d’une boussole. Cela la fit sourire. Il aurait bien besoin d’être guidé à l’heure actuelle.

- Qu’est-ce qui ne va pas ? finit par demander Jewel.

- Ce n’est rien.

Jewel lui lança un regard entendu. Sinead lâcha le morceau.

- J’ai peur de ce qui nous attend.

Jewel fit un geste de la main comme pour balayer l’air.

- Arrête de te prendre la tête, la coupa-t-elle gentiment. On n’est complètement largué. Quoiqu’on fasse… Quoiqu’il arrive, on ne pouvait pas le deviner. Tout cela va se jouer à la chance.

Sinead laissa ses doigts jouer dans l’eau de la bassine. Jewel avait entièrement raison. Mais n’y aurait-il pas moyen de faire pencher la balance en leur faveur ? Juste un tout petit peu. Son amie plongea et réapparut quelques minutes plus tard, l’eau ruisselant sur son visage. Sinead se tourna vers la grande surface lisse de l’oasis qui semblait inébranlable malgré leur présence et appuya son menton dans ses mains le long du rebord de la bassine.

- Ca ne te fais pas peur de savoir qu’on peut mourir à tous moment, voir de savoir qu’on aurait pu l’éviter ? demanda Sinead, le regard dans le vague.

- Alors déjà, si je suis morte, je ne pourrais pas savoir que j’aurais pu l’éviter… Et puis ce sera trop tard de toutes les façons.

Jewel attrapa le savon tout en réfléchissant.

- Quant à mourir demain… Il faut bien mourir un jour. L’important, c’est de vivre pleinement ce que tu veux vivre.

Tout paraissait si simple dit comme cela. Jewel l’éclaboussa gentiment.

- Savoure le présent, tu t’occuperas du futur quand il arrivera.

Sinead rigola.

- Merci.

- Pas de quoi ma belle, répondit Jewel avec tendresse.

Alors qu’elles finissaient de vider l’eau du bain, Jewel s’arrêta subitement pour fixer l’horizon. Sinead s’arrêta à son tour, cherchant ce qui perturbait son amie.

- Tu le vois ?

Sinead hocha négativement la tête. Etait-ce une hallucination ? Mais son amie semblait bien distinguer quelque chose et bien décidé à comprendre ce que c’était. Elles restèrent là, à attendre que la chose finisse par devenir visible. Au bout d’un moment, Sinead finit par enfin distinguer la tâche sombre que lui décrivait son amie depuis quelques minutes. Maintenant qu’elle l’avait enfin repéré, impossible de la manquer. Enfin, il semblait de plus en plus évident que la chose se rapprochait. Lentement mais sûrement. Et puis soudain, le jour se fit.

- C’est une tempête, murmura Sinead.

Les nuages noirs étaient maintenant immanquables.

- Vous aussi vous l’avez vu ?

Les deux jeunes filles sursautèrent lorsque Léonard les interpella. Léna était sur ses talons, l’air soucieuse. Ils restèrent plusieurs minutes à fixer l’étrange phénomène. Il ne faisait aucun doute que cela n’avait rien d’une simple tempête. Cela ressemblait à une étrange tâche sombre, un ensemble de nuages féroces, roulant au dessus des dunes lointaines. A cette distance, impossible de savoir ce qu’il se passait en son cœur en dehors des puissants éclairs dont le son ne leur parvenaient même pas.

- Elle doit être très loin, murmura Léna.

- Alors elle doit être énorme, compléta Léonard.

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Blanche Plume
Posté le 10/08/2021
Hello ! :3

Un chapitre à l'apparence calme pour aujourd'hui, donc.
J'admire la façon dont Jewel semble limite contente d'être ici, qu'elle ne cherche pas à comprendre comment ni pourquoi elle se trouve dans l'oasis XD Je pense qu'elle aurait paniqué un peu plus si elle avait été toute seule... x)
Cette tempête n'a donc rien de normal, je vois... Une sorte de tempête de choas, donc ? Mmmmh... Peut-être sera-t-elle inévitable ? Peut-être est-ce elle qui va enfin les téléporter ailleurs ? Peut-être même est-ce elle qui a débarrassé les habitants de cet endroit ? Que de mystères... ^^'

Sinon, comme d'habitude, j'ai pris le loisir de relever les fautes que j'ai pu apercevoir. Si ça te dérange vraiment, d'ailleurs, n'hésite pas à me le dire, et j'arrêterai ^^'

«des inconnus en surgirent» surgir
«les meilleures conseillèrent» conseillères
«entre ses dunes» ces
«sans être inquiéter» inquiétés
«on n'est complètement» on est
«Quoiqu'on fasse» Quoi qu'on
«Quoiqu'il arrive» Quoi qu'il
«voir de savoir» voire

Voilà, voilà, j'attendrai la suite le temps qu'il faudra ! ;)

- Blanche Plume.
Sina Edole Pari
Posté le 10/08/2021
Coucou! ^^
Ca me fait vraiment plaisir d'avoir tes retours, c'est super stimulant merci beaucoup! Et ça apporte tellement d'avoir des points de vues extérieurs!
Et tu peux continuer à relever les fautes tant que tu en as l'énergie, je note tout et je corrigerais ça prochainement avec les remarques.
Encore merci! La suite va vite arriver :D
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