Chapitre 17 - Del

Notes de l’auteur : Bonjour :D Un long chapitre qui commence bien et qui finit, euh... haha. Ahem. Vous reprendrez bien un peu de thé avec ces cookies ?
Bonne lecture !

Lorsque Sehar lui exposa son idée - embarquer sur la ruine de bateau restée sur le port - Del ne pensa pas, comme n’importe qui d’un brin raisonnable : mais quel plan dangereux, on ne ferait pas mieux de trouver notre chemin vers Pied-de-Troll et demander de l’aide ? J’ai vraiment mal, il faudrait rester prudent…

Bien sûr que non. 

La première pensée qui le traversa, et donc la meilleure, fut celle-ci : J’ai le béguin pour un type qui a vraiment des idées de merde. C’est fichu pour mon plan de survivre à cette aventure.

Tout naturellement, alors, Del lui adressa un grand sourire, et répondit la chose la plus raisonnable du monde :

— C’est parti !

Sehar lui rendit le sourire, et avança hors du couvert des arbres. Ils traversèrent le port abandonné à pas prudent, au cas où des gardes seraient restés en arrière et se cacheraient derrière les caisses vides ou les poteaux d’attaches - mais il n’y avait vraiment plus personne. Juste eux deux, dans un grand port vide au Bout du Monde.

Après en avoir tant entendu parler, Del s’attendait à ce que la vue du vide le choque, ou le remplisse d’admiration - mais c’était juste une grande étendue de nuages qui se poussaient paresseusement, et qui ne laissait rien voir ni du rien qui se trouvait au-dessous, ni des châteaux qui flottaient au loin. 

Néanmoins, les nuages étaient tout de même très jolis, et Del avait presque envie de dormir dessus - ou de les manger, il n’en était pas certain. Mais surtout, il était très tenté de coller sa tête en entier dedans jusqu’à ce que ses démangeaisons disparaissent. Ce qui, malheureusement, n’arriverait jamais…

Ou peut-être que si, en fait ?

— Maro a bien dit que c’est dans les nuages que les maegis sont en sécurité, non ? Donc, théoriquement, j’aurais plus besoin du générateur ?

Sehar cligna des paupières. Il détacha avec difficulté le regard du paysage, qu’il avait clairement admiré avec bien plus de sérieux que le maegis. Il tordit légèrement la bouche, et sa queue s’agita nerveusement, avant qu’il n’hausse les épaules.

— Essaye de retirer le masque, et de respirer sans ? suggéra-t-il. Si tu te sens pas bien on saura tout de suite… Mais je sais pas si -

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Del avait déjà retiré l’appareil, sans aucun scrupule, et inspira à pleins poumons.

La bonne nouvelle, c’était qu’il se sentit aussitôt bien mieux à respirer l’air brassé par les nuages gigantesques, que celui des minuscules nimbus de son générateur.

La mauvaise - il y en avait toujours une, c’était une règle, avec sa santé - était que l’appareil disjoncta, un des câbles sauta de sa prise et lui pinça la peau, et Del fit tomber l’ensemble qui explosa par terre en morceaux impossibles à recoller.

Sehar regarda le carnage avec une mine horrifiée, et Del rigola nerveusement.

— Bon, j’espère qu’il flotte ce bateau, parce que je peux plus faire demi-tour… et hors de question que je me fasse chier à attendre au bord du monde que Lo revienne !

Le maegis s’accrocha au bras de Sehar, ce qui suffit à sortir l’hybride de son choc.

— Tu, euh… ça va aller, alors ?

— Mais oui, assura-t-il avec une petite tape de sa main libre sur le bras auquel il se tenait. 

Del passa sous silence le tremblement dans ses jambes, la sensation qu’il avait que sa colonne vertébrale se faisait écraser par le peu de muscles qu’il avait autour, sa magie qui bouillonnait sous la surface, juste à la lisière de sa cicatrice, prête à éclater et se déverser au-dehors. Sehar n’avait pas besoin de savoir ce genre de petits détails anodins. Del se sentait toujours mal, mais il allait mieux, alors ils devaient continuer. 

Ne serait-ce que pour voir la tête de Lo, quand ils débarqueraient avec leur bateau volé pour les sauver, Nodia et iel. La grande classe.

— Oh, c’est un peu…

Sehar termina sa phrase avec une grimace, et Del l’imita dès que son regard tomba à son tour sur leur carrosse. De loin, le bateau avait eu l’air en mauvais état - de près, le terme épave paraissait plus approprié. Un des trois mats était brisé, et un second rafistolé avec des tissus serrés par des cordages ; la coque était trouée à plusieurs endroits, et une partie des bidules et engrenages étaient empilés sur le pont plutôt que fièrement installés sur le système de maniement des voiles. Plus perturbant - et Del espérait que Sehar ne pouvait pas le percevoir - l’aura magique du bateau était fatiguée. Très, très fatiguée.

Mais ils avaient besoin de ce truc délabré. Ils avaient besoin de voler. 

— Il flotte, c’est tout ce dont on a besoin ! affirma Del.

Avec un grand sourire, il lâcha le bras de Sehar, et s’avança vers le pont d’embarquement pour grimper sur l’épave - mais l’hybride le retint, aussitôt sa surprise passée.

— Attends ! Juste pour être sûr… Je vais tester la solidité. J’ai vu des câbles, là…

Del se résigna à attendre un peu, alors que Sehar rassemblait des câbles et les examinait. Il souleva son débardeur pour dévoiler un harnais et de jolies écailles ventrales presque argentées, avant de fixer avec expertise les liens à des mousquetons de sécurité. Il revérifia une dernière fois son matériel, se fixa à un des poteaux d’amarrage du port, puis, après un dernier regard mal assuré dans la direction de Del qui l’encouragea d’un sourire, l’hybride posa un pied sur le bateau.

Les planches grincèrent, et Del retint son souffle.

Mais même après le deuxième, troisième, quatrième pas de Sehar, le bateau tenait toujours bon. L’hybride se permit même de sauter sur place, sans que leur épave ne montre aucun signe de mort imminente. 

— Je pense que c’est bon, constata Sehar. On va faire le même test avec toi en plus…

L’hybride n’eut pas le temps de revenir sur la terre ferme.

Quelque chose, dans les entrailles du navire, avait bougé. 

Sehar recula, les yeux écarquillés, et Del guida sa magie jusqu’au bout de ses doigts, prêt à lancer un sortilège, le premier qui venait, si un quelconque danger se présentait…
A l’autre bout du pont, près de ce qui ressemblait à une cabine de contrôle, une trappe s’ouvrit. Un énorme oiseau noir, un peu plus large qu’un gnome ordinaire, en sortit la tête pour les regarder avec d’immenses yeux ronds.

— C’est quoi tout ce boucan ? croassa l’oiseau.

Pendant quelques battements de coeur, Del resta immobile, sans oser lâcher son sortilège, ni être tout à fait certain qu’ils étaient vraiment en sécurité. L’oiseau n’avait pas l’air très content de les voir, et s’il était là, c’était sans doute pour garder le bateau. C’était vraiment trop demander, de juste pouvoir emprunter tranquillement une épave et voguer avec jusqu’à ce qu’ils retrouvent par hasard leur ami dans les nuages ? 

Dit comme ça, ce n’était pas tellement plus encourageant, mais Del savait se contenter de peu.

— Toi, là, qu’est-ce que tu fais avec tout ces câbles ? croassa de nouveau l’oiseau.

— Euh… répondit Sehar avec beaucoup d’éloquence.

— Et toi, pourquoi tu n’as pas attendu d’être à la distance réglementaire pour retirer ta combinaison ?

— Ah, euh… fut la réponse tout aussi charismatique de Del.

— Et pourquoi vous n’êtes pas repartis avec les autres ?

Pas un son ne sortit de leurs lèvres, cette fois-ci. L’oiseau sautilla hors de sa trappe jusqu’à Sehar, trop vite pour que ce dernier n’ait le temps de s’éloigner, et détacha les câbles d’un habile coup de bec.

— Les ados, toujours à faire des conneries pour se rendre intéressant, rouspéta le gardien. J’en ai marre, je vous jure. Allez, houste !

Il chassa Sehar d’un geste de ses ailes, et ce dernier recula d’un pas - mais pas un de plus.

— N-nous devons rentrer au plus vite, Del est malade ! lâcha-t-il. 

L’oiseau s’arrêta, ses plumes noires légèrement hérissées et ses yeux ronds encore plus noirs fixé sur eux. Dès que son regard se posa sur Del, ce dernier s’empressa de grimacer pour exagérer sa douleur - hé, il ne mentait qu’à moitié ! - et fit mine de tituber. Les plumes de l’oiseau se détendirent légèrement, et il tourna la tête sur le côté.

— Allons bon, qu’est-ce qu’il t’arrive, l’oisillon ? 

L’oiseau voleta jusqu’à lui, aussitôt suivit de Sehar, qui affichait une mine décidément inquiète. Del n’était pas certain de s’il avait peur que l’oiseau l’attaque, ou s’il pensait que Del avait soudainement aussi mal qu’il le prétendait.

— Mon filtre s’est cassé, et…

Le maegis prétendit s’évanouir, et atterrit immédiatement dans les bras de Sehar.

— Il faut qu’on revienne tout de suite, insista l’hybride. O-on ne peut pas attendre le prochain bateau ! 

Le gardien sautilla d’une patte à l’autre, l’air bien embêté par la situation, puis il siffla entre son bec et secoua la tête avec résignation.

— Si tu as besoin d’un médecin tout de suite, ça oui, parce que le prochain passage est dans une semaine. Et Edgard Dune est beaucoup trop loin pour qu’il arrive à temps même si on lui envoie un bourdon… je suppose que c’est une urgence, alors.

Del eut la vague impression que l’oiseau n’acceptait pas juste parce que la situation était exceptionnelle. C’était surtout une bonne raison de faire bouger le bateau, et peut-être - peut-être - que le volatile grognon s’ennuyait assez pour risquer de briser ses ordres. 

— Excuse-moi, monsieur oiseau, mais euh… comment tu t’appelles ? demanda Del.

— Suzette, répondit l’oiseau. Et madame serait plus approprié, mais je me passe de ces civilités inutiles.

— Oh okay, enchanté Suzette ! Moi c’est Del, et lui c’est Sehar.

— Et bien Del, la prochaine fois que tu te balades avec ton copain, évite de te perdre loin des autres, y’aura pas toujours quelqu’un pour t’aider ! Vous imaginez si j’avais pas été là ? Qu’est-ce que vous auriez fait, pris ce navire tout seul ?

Suzette sautilla de nouveau sur le pont, et lâcha un rire-croassement qui était plus inquiétant qu’autre chose.

— Ah ! J’aurais bien aimé voir ça ! continua-t-elle. Crash-boom-bang sur la falaise, ça c’est sûr !

Del et Sehar échangèrent un regard perplexe, et le maegis pouffa malgré lui.

— Suzette a pas tort, murmura-t-il. Tu crois qu’elle pourrait nous amener à Lo ?

Sehar regarda l’oiseau noir, et son regard encore craintif en disant bien assez long. 

— Peut-être ? Je ne sais pas…

— Toi, là, Sehar ! interpella Suzette. Va donc installer ton copain dans la cabine et viens m’aider à lancer la machine, tu veux ?

Del retint un nouveau rire, et couina de surprise quand Sehar le souleva dans ses bras. Le maegis avait déjà oublié qu’il était sensé prétendre être encore plus malade qu’il ne l’était, et qu’il était donc parfaitement logique - et profitable - que l’hybride soit obligé de le porter.

La cabine était tout aussi délabrée que le reste, mais contenait encore deux banquettes intactes relativement confortables, et une sorte de panneau de contrôle bien plus complexe que ce que Del avait déjà pu voir au cours de sa vie. Quelques outils rouillés étaient accrochés aux parois, et une épaisse couche de gras masquait en partie une carte murale. Sehar le déposa sur une des banquettes avant de rejoindre Suzette, et Del les observa travailler par la grande vitre de la cabine pendant quelques instants, un sourire amusé aux lèvres.

Mais immobile et seul, il n’avait plus rien pour chasser la fatigue. Il vacilla un peu, le regard trouble. Malgré la bouffée d’air pur qu’il avait pris, malgré la légèreté retrouvée dans son dos, soulagé du générateur, il se sentait si lourd…

Il regarda par-delà le bateau, du côté des nuages. Ses paupières papillonnaient, et il sentit des larmes monter avant même que la raison ne se fasse entendre entre ses deux oreilles.

Où était Lo ? 

Est-ce qu’iel allait bien ? 

Est-ce qu’iel avait aussi peur que lui ?

Del secoua la tête pour chasser ses idées noires. Non ! Lo maîtrisait la situation. Iel était lea chevalierresse qui déjouait toujours l’adversité, ne reculait jamais devant un défi, avait remporté des prix face à des maegis plus âgé et plus compétents !

Lo s’en sortirait forcément. Surtout avec Nodia, qui faisait flipper et qui était largement assez capable de se défendre et d’aider lea faune à botter des culs. 

En plus, maintenant que Del et Sehar étaient dans les nuages, le maegis n’aura plus de problème pour respirer. Donc, la seule chose qu’ils avaient à faire, c’était de retrouver Lo et Nodia, et ne pas se faire chopper. Rien d’autre. 

C’était simple, même pour un apprenti chevalier raté, et un bourrin mal assuré de sa force. Ils pouvaient le faire… 

Alors si la sensation d’étouffement et d’écrasement qui s’invitait dans son estomac, et qui n’avait rien à voir avec ses douleurs habituelles pouvait s’en aller, ce serait bien, merci !

Un croassement interrompit ses pensées, et Del regarda de nouveau vers le pont, où Sehar et Suzette avaient hissé les voiles et stabilisé plusieurs cordages.

— Et voilà ! En route, les jeunes !

Suzette détacha les câbles qui retenaient le bateau au port, et sans attendre, le navire se mit en route avec un grincement sinistre.

Del n’avait jusque là pas particulièrement senti de différence entre être assis sur une banquette sur la terre ferme, et être assis sur une banquette dans un bateau qui flottait dans les airs. Mais dès que ce dernier avança, tout autour de lui tangua et vacilla, presque autant que la fatidique sphère qui leur avait servi de vaisseau pour arriver de ce côté ci du désert. Del s’accrocha à son siège, même si cela ne changerait pas franchement grand chose si le bateau décidait de tomber en morceau.

Suzette ouvrit la porte de la cabine, et entra, suivie de très près par Sehar, qui n’avait visiblement pas envie de prendre le risque de laisser l’oiseau seule avec lui.

— On sera arrivé dans une heure, annonça-t-elle. Alors faites pas de bêtises, certaines des rambardes sont plus ce qu’elles étaient… 

— Il n’y a pas besoin de… euh, piloter le bateau ? demanda l’hybride.

Suzette croassa, hilare, et agita ses ailes.

Piloter le bateau ! répéta-t-elle. Ces touristes ! J’aurais tout entendu !

Elle secoua la tête, et s’éloigna en répétant le mot touriste, toujours avec le même rire. Del et Sehar échangèrent un regard surpris, avant que le maegis ne hausse les épaules et tende une paume vers l’hybride.

— On va regarder les nuages ?

Sehar acquiesça, et interpréta visiblement sa main tendue comme une demande à être porté, car il souleva de nouveau Del entre ses bras pour l’emmener au dehors. 
Ils s’installèrent sur l’un des côtés du bateau, là où les rambardes semblaient moins dramatiquement dangereuses qu’ailleurs, puisque Suzette avait pris possession de la proue. L’oiseau noir était perché sur une pique, les yeux rivés au devant, et ses ailes repliées chaudement autour d’elle. 

De toute façon, que ce soit devant, derrière, ou sur les côtés, le paysage était le même. Del inspira une grande goulée d’air brassé par les nuages, et ses tremblements s’atténuèrent légèrement - assez pour que son sourire revienne.

— C’est quand même bien, les aventures, rit-il.

— Tu n’as pas peur ? demanda Sehar avec surprise.

Pendant un instant, Del contempla la possibilité de mentir, pour avoir l’air plus classe qu’il ne l’était. Et après avoir bien examiné cette possibilité, il s’avérait que c’était en effet une excellente idée.

— Bien sûr que non, Suzette a l’air d’être une pilote émérite !

Un coup d’oeil vers l’oiseau lui apprit qu’elle était présentement en train de caqueter et de tenir une conversation seule avec les nuages. Ce qui, pour être honnête, était on ne peut plus normal. Sehar s’était un peu recroquevillé sur lui-même, sa queue enroulée autour de lui, et il tripotait ses longs cheveux noirs sans rien oser dire.

— Et toi, tu as peur ? demanda Del, bien que la réponse était évidente.

Sehar le regarda en coin, puis tourna de nouveau ses yeux vers les nuages.

— Je suis aussi terrifié que le premier jour après l’atterrissage, murmura-t-il. Mais ça va mieux, je crois ? 

Del rit un peu, et il fut presque jaloux que l’aveu de l’hybride soit finalement plus classe que son mensonge à lui.

— Tu vas vite prendre le coup. Après quelques aventures, on a vite peur de rien ! Là, je n’ai pas peur que le bateau s’effondre, par exemple.

Sehar fronça les sourcils, et ses muscles se tendirent légèrement.

— Ou que Suzette ait vu clair dans notre jeu, et soit en fait en train de nous mener directement dans les mains des vilains maegis fouteurs de merde ! continua Del.

L’hybride regarda nerveusement l’oiseau, et Del s’en voulait presque de le faire souffrir. Mais sa mine horrifiée était beaucoup trop drôle.

— Ni que peut-être, ce sont nos derniers instants à être en vie, et qu’il ne nous reste plus que… aller, quinze minutes si on est optimiste ?

Le pauvre Sehar le regarda avec des yeux suppliants - et, promis, Del avait prévu de cesser là la torture. Il avait prévu de rire un peu, et de lui appuyer sur le bras pour relâcher la pression. Et peut-être même que, sur un coup de tête, il lui aurait finalement avoué que lui aussi, il avait peur, en réalité.

Mais il n’eut même pas le temps d’ouvrir la bouche.

Le bateau grinça, plus que n’importe quand durant les dernières minutes. 

Il grinça si fort que si Sehar avait parlé, ou que Suzette avait crié pour les appeler, Del ne les aurait pas entendus. Il sentit la faible magie qui animait le bateau - celle qui, maintenant qu’il y pensait, était sans doute leur seul pilote - s’agiter de manière alarmante, dans un déchirement qui résonna dans les veines du maegis.

Pour confirmer ses craintes, Suzette avait sautillé jusqu’à eux, et entre deux grincements sinistres, leur cria :

— Vous deux là ! Dans la cabine, et vite !

— Qu’est-ce qu’il se passe ? demanda Sehar.

— Si la coque lâche, il faut qu’on se mette dans la barque de sécurité. C’est aussi la cabine. Alors hop hop ! Pas de temps à perdre!

Ils n’en perdirent pas une seconde de plus - mais c’était déjà trop tard.

Le bateau bascula brusquement en avant, et ils glissèrent tous les trois. Suzette fut la plus rapide - elle battait des ailes pour se maintenir à leur niveau, et Sehar attrapa Del d’un bras et un des mats de l’autre. Le maegis s’accrocha à l’hybride autant qu’il put, sa propre magie aussi troublée que celle du navire qui perdait de plus en plus d’énergie.

— Suzette ! appela Sehar. Tu peux porter Del dans la barque ? 

— Mais -

— Donne-le moi ! confirma l’oiseau sans lui laisser le temps de protester.

Le mat auquel Sehar était accroché grinça, et Suzette attrapa Del dans ses serres. Le maegis, inutile et terrifié, se laissa porter jusqu’à la cabine-barque, alors que Sehar avait lâché sa prise pour grimper le pont à leur suite. Comme d’habitude, l’hybride avait d’excellents instincts qui reprenaient le dessus dans les pires instants - alors que Del, lui, faisait de la grosse merde, comme avoir très envie de vomir par exemple. Suzette le porta jusqu’à la cabine, le posa entre les deux banquettes pour qu’il ne glisse pas, et activa un sortilège de sécurité pour reprendre le contrôle de la barque.

— Plus que deux mètres ! encouragea Suzette.

Del jeta un coup d’oeil terrifié par-dessus la banquette, et vit que Sehar les avait presque rejoint.

Presque étant ici, bien entendu, le mot le plus important.

Alors que l’hybride détachait une de ses mains pour s’accrocher et se hisser plus haut, le bateau vira sur le côté, et la cabine, nouvellement transformée en bateau de sauvetage, s’en sépara complètement.  

Del tendit une main vers Sehar, un sortilège de secours lancé bien avant que l’idée ne le traverse.

Mais c’était trop tard.

Avec un cri de panique, Del vit Sehar perdre toutes ses prises, et disparaître derrière les nuages.

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Nanouchka
Posté le 24/01/2022
Salut Anatole,

Alors c'est fou, parce qu'à chaque fois que je te fais un commentaire sur quelque chose, le chapitre suivant vient éclairer ce que je voulais dire. J'ai beaucoup aimé le rythme de ce chapitre, on prenait le temps d'explorer les émotions et l'humour de chaque aspect de la situation, et en même temps il se passe mille choses, et on est en danger, et on fait grandir les personnages, et on regarde le paysage, et tout baigne, et tout fout le camp. C'était top.

Je me suis demandé si :
- peut-être ça vaudrait le coup que l'oiseau ait des soupçons à un moment donné ? Parce que ça me semblait peu crédible qu'il accepte juste leur version des faits.
- "faisait de la grosse merde" n'était pas hors ton ?
AnatoleJ
Posté le 27/01/2022
Haha, c’est rassurant pour moi, si j’en suis capable au chapitre suivant c’est peut-être que j’ai appris inconsciemment des maladresses que je viens de pondre ? (L’espoir fait vivre). Très content que tu aies apprécié ce chapitre en tout cas :D

Il y a une explication (qui sera donnée plus tard) pour le fait que Suzette laisse passer leur mensonge gros comme un château volant, mais c’est vrai que ça pourrait être un peu mieux amené dès maintenant !
« Faisait de la grosse merde » est peut-être légèrement hors ton effectivement, c’est ce que Del dirait à haute voix mais l’équilibre avec la narration à la 3e personne est fragile, j’y réfléchis

Merci pour tes retours toujours aussi qualitatifs :D
Mathilde Blue
Posté le 14/07/2021
Coucou :D

Je ne pouvais pas posté de commentaire dimanche, mais j’ai craqué et j’ai quand même lu le chapitre, du coup je le lis deux fois parce que c’est très cool ^^

Mais mais mais… T_T C’est quoi cette fin horriblement cruelle ?? T_T Je proteste, je démissionne, c’est atroce T_T Donc Sehar est en chute libre ? Del se retrouve seul avec Suzette et un bateau cassé ? Et Lo et Nodia sont pas là ? C’est quoi ça ? T_T

À part ça (je t’en veux quand même), c’était un plaisir de découvrir enfin Suzette, totalement conforme à ce que j’imaginais ^^ Et Del et Sehar étaient vraiment super mimis, avant que tu ne décides de les séparer T_T

Mes longues notes (pas forcément très utiles) :

« J’ai le béguin pour un type qui a vraiment des idées de merde. C’est fichu pour mon plan de survivre à cette aventure. »
C’est tellement ça, j’adore xD (Bon j’espère quand même qu’il va survivre hein, y a intérêt).

« Tout naturellement, alors, Del lui adressa un grand sourire, et répondit la chose la plus raisonnable du monde : »
Je ne suis pas très convaincue par le placement du « alors » dans la phrase, ça casse la fluidité je trouve, peut-être que ça passerait mieux s’il allait après le verbe ? (Et non, c’est tout sauf raisonnable).

« La mauvaise - il y en avait toujours une, c’était une règle, avec sa santé - était que l’appareil disjoncta, un des câbles sauta de sa prise et lui pinça la peau, et Del fit tomber l’ensemble qui explosa par terre en morceaux impossibles à recoller. »
Non mais Del t’aurais pu faire attention quand même T_T Si votre bateau décolle pas tu seras dans la merde T_T

« Del passa sous silence le tremblement dans ses jambes, la sensation qu’il avait que sa colonne vertébrale se faisait écraser par le peu de muscles qu’il avait autour, sa magie qui bouillonnait sous la surface, juste à la lisière de sa cicatrice, prête à éclater et se déverser au-dehors. »
C’est pas franchement rassurant T_T

« Ne serait-ce que pour voir la tête de Lo, quand ils débarqueraient avec leur bateau volé pour les sauver, Nodia et iel. La grande classe. »
Alors oui, mais pour ça faudrait être encore en vie x) (sans vouloir être pessimiste)

« — Il flotte, c’est tout ce dont on a besoin ! affirma Del. »
Alors oui mais non, parce que s’il flotte sur une durée limitée ça va pas être possible T_T

« Un énorme oiseau noir, un peu plus large qu’un gnome ordinaire, en sortit la tête pour les regarder avec d’immenses yeux ronds. »
Suzette :D

« — Les ados, toujours à faire des conneries pour se rendre intéressant, rouspéta le gardien. J’en ai marre, je vous jure. Allez, houste ! »
Je ne sais pas pourquoi, mais ça correspond totalement à l’idée que je me faisais de Suzette xD

« Dès que son regard se posa sur Del, ce dernier s’empressa de grimacer pour exagérer sa douleur - hé, il ne mentait qu’à moitié ! - et fit mine de tituber. »
J’en peux plus, quel comédien franchement xD

« Del n’était pas certain de s’il avait peur que l’oiseau l’attaque, ou s’il pensait que Del avait soudainement aussi mal qu’il le prétendait. »
Je trouve cette phrase un peu confuse, au début je pensais que le « il » renvoyait à Del, mais en fait je crois que c’est à Sehar, donc voilà ^^’

« Et Edgard Dune est beaucoup trop loin pour qu’il arrive à temps même si on lui envoie un bourdon… »
C’est pas le médecin du prologue lui ? Le fameux frère de Gulliver ? D’ailleurs rien à voir mais Suzette existe avec le même principe que Gulliver c’est ça ? Elle a été créée par un maegis ? Désolée je me souviens plus du nom ^^’

« et son regard encore craintif en disant bien assez long. »
*disait

« mais contenait encore deux banquettes intactes relativement confortables »
Comment ils peuvent savoir qu’elles sont confortables s’ils ne les ont pas encore testées ? ^^

« Ses paupières papillonnaient, et il sentit des larmes monter avant même que la raison ne se fasse entendre entre ses deux oreilles. »
Oh mon p’tit cœur T_T

« C’était simple, même pour un apprenti chevalier raté, et un bourrin mal assuré de sa force. »
C’est quand même super triste, cette phrase m’a un peu brisé le cœur… Mais du coup pourquoi Del se considère comme un apprenti chevalier raté ?

« Et après avoir bien examiné cette possibilité, il s’avérait que c’était en effet une excellente idée. »
C’est pas beau les mensonges Del…

« bien que la réponse était évidente »
Je ne suis pas sûre que l’usage de l’imparfait soit le plus adapté, j’aurais plutôt vu un « soit » (ou un « fut » à la rigueur) ^^

« Del rit un peu, et il fut presque jaloux que l’aveu de l’hybride soit finalement plus classe que son mensonge à lui. »
Ben oui, dans ce genre de cas la vérité c’est mieux quand même ^^

« Mais sa mine horrifiée était beaucoup trop drôle. »
En fait, Del est super sadique xD

« et, promis, Del avait prévu de cesser là la torture. Il avait prévu de rire un peu »
La répétition de « prévu » est pas très jolie je trouve :)

« Le bateau grinça, plus que n’importe quand durant les dernières minutes. »
Bah voilà… Le retour des ennuis… Sinon j’ai un peu tilté sur la formulation de la phrase, mais je ne saurais pas te dire pourquoi ^^’ C’est peut-être l’enchaînement « plus que n’importe quand durant ».

« alors que Del, lui, faisait de la grosse merde, comme avoir très envie de vomir par exemple »
Comme on est en plein milieu de la narration (dans un moment un peu intense), je trouve que « faisait de la grosse merde » casse plus la narration qu’autre chose ^^

Voilà ! :D Je ne pourrai pas poster de commentaire parce que je pars en vacances, mais je me rattraperai vite à mon retour ! À bientôt :D
AnatoleJ
Posté le 15/07/2021
Coucou :D

Je suis pas le seul à lire plusieurs fois un chapitre avant d’écrire un commentaire, ça me rassure xD (d’ailleurs j’ai déjà lu le dernier chapitre du sang des dieux et si jamais je n’ai pas le temps d’écrire mon commentaire ce soir, tu peux déjà te préparer mentalement à me lire râler sur l’absence de câlins)

« Donc Sehar est en chute libre ? Del se retrouve seul avec Suzette et un bateau cassé ? Et Lo et Nodia sont pas là ? C’est quoi ça ? T_T »
C’est un crime voilà ce que c’est T_T Je plaide coupable, et c’est même pas mon dernier méfait (mais ne démissionne pas, ça finit bien ! Enfin je crois... Faut que je vérifie...)

J’ai bien vendu Suzette on dirait xD Et oui, ils sont trop mignons les deux petits, franchement les séparer ne serait-ce que quelques minutes c’est juste de la maltraitance de personnage pure et simple T_T (bon sur ce point je me rattrape vite, on espère)

« C’est tellement ça, j’adore xD (Bon j’espère quand même qu’il va survivre hein, y a intérêt). »
Ce qui me fait le plus rire c’est qu’ils ont des caractères totalement opposés, mais pour avoir des idées foireuses et les mener à bien, là c’est bon, ils sont parfaitement alignés xD

« Je trouve cette phrase un peu confuse, au début je pensais que le « il » renvoyait à Del, mais en fait je crois que c’est à Sehar, donc voilà ^^’ »
Bien vu, il y a trop de « il » dans cette phrase x) Je vais la reformuler mais en attendant, si je remplace par leurs prénoms ça donne ça :« Del n’était pas certain de si Sehar avait peur que l’oiseau l’attaque, ou si Sehar pensait que Del avait soudainement aussi mal que Del le prétendait. »

« C’est pas le médecin du prologue lui ? Le fameux frère de Gulliver ? »
Oui, c’est bien ce même médecin qui a la joie, que dis-je l’honneur suprême, d’avoir Gulliver comme petit frère x) Et pour le reste de tes questions, pas d’inquiétude, il y aura une explication au chapitre suivant (parce que c’est un peu important pour l’intrigue héhé)

« Comment ils peuvent savoir qu’elles sont confortables s’ils ne les ont pas encore testées ? ^^ »
L’expérience xD A force de s’assoir partout, il sait reconnaître la qualité au premier coup d’oeil !

« C’est quand même super triste, cette phrase m’a un peu brisé le cœur… Mais du coup pourquoi Del se considère comme un apprenti chevalier raté ? »
Tu l’imagines avec une épée ? Un vrai carnage, personne de raisonnable ne l’aurait adoubé enfin x) (bon il y a une vraie raison, mais chut, c’est pour plus tard)

« C’est pas beau les mensonges Del… »
Mais si enfin, mentir c’est très utile, ça lui sert pour faire la comédie et s’assurer que Suzette ne se doute de rien ! Aucune chance que ça se retourne contre eux à aucun moment !

« En fait, Del est super sadique xD »
Dans les soirées films d’horreur, Del ce serait celui qui attend les moments bien tendus pour faire « bouh » ou glisser sa main comme une araignée dans le cou de ceux qui stressent xD (heureusement qu’ils ont pas de films dans ce monde... ou dommage, je ne suis pas sûr xD)

C’est noté pour toutes les typos et les corrections, merci ^^
Bonne vacances :D (si tu continues à publier pendant que tu n'es pas là je spammerais tes notifs avec mes commentaires si tout va bien haha)
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