Chapitre 1 : Ate Dalo

LA VAGUE QUI NOUS SEPARE

CHAPITRE 1 : Ate Dalo

J’attends sur ce canapé depuis une bonne dizaine de minute. Comme dans mes souvenirs, cette pièce est pleine de couleurs : des murs jaunes et bleus sur lesquels sont accrochés des dessins d’enfants, un bureau et quelques tables basses rose clair avec des crayons de couleurs et des feuilles de papier blanc disposées dessus, quelques tapis tout aussi colorés et pour finir un canapé bleu sur lequel étaient disposés un ou deux coussins verts. Le diplôme de la psychologue est accroché au mur à côté de quelques livres posés sur une étagère. Bref un espace des plus chaleureux et apaisant. Pourtant, je ne me sens pas apaisée, c’est certainement la raison pour laquelle je suis actuellement chez une psychologue. Je continue de scruter la pièce pour passer le temps lorsque j’entends des talons qui tapent sur le sol, le son se rapproche de plus en plus vers la porte, puis la porte s’ouvre et une femme qui doit avoir la cinquantaine entre dans la pièce. Elle me regarde en souriant et s’assoie sur un fauteuil en face de moi. Elle tient entre ses mains un bloc note et un stylo, note quelque chose sur cette feuille et relis d’autres notes prises auparavant.

- Lucie, cela faisait longtemps que je ne t’avais pas vu dans mon cabinet, 12 ans si je compte bien.

- Oui, ça doit être ça.

- La dernière fois que l’on s’est vu, c’était pour le divorce de tes parents et il me semblait que tu le vivais très bien. Donc dis-moi, pourquoi viens-tu aujourd’hui, et de quoi veux-tu me parler cette fois-ci, à moins que ce ne soit pour le divorce de tes parents ?

- Non non ne vous inquiétez pas, pour mes parents la page est tournée depuis 12 ans. Si je viens vous voir aujourd’hui, c’est parce que j’ai des problèmes que je n’avais pas avant et je veux m’en débarrasser. Et je pense qu’en parlant de tout ça avec vous ça pourrait m’aider.

-Es-tu venu de ton plein gré ou y as-tu été incité par ta famille ?

- Au départ, je ne me rendais pas compte, mais ils m’ont fait comprendre que j’avais besoin d’aide, car je ne pouvais pas m’ouvrir à eux.

- Et sur quel sujet ne peux-tu pas t’ouvrir à eux ?

- J’ai eu un événement que l’on pourrait qualifier de traumatique. Si vous le voulez bien, je vais vous raconter toute l’histoire, mais je souhaiterais ne pas être interrompu avant la fin, car je ne sais pas si j’arriverais à tout dire si je dois répondre à vos questions pendant que je vous raconte ce récit.

-Très bien, on fait comme tu le sens.

Avant de commencer, je pris une grande inspiration puis soufflai tout l’air contenu dans mes poumons. J’essayais de me remémorer de tout pendant quelques secondes, de nombreux flash-backs des événements passés me sont apparus, puis je dirigeai mon regard vers la psychologue pour commencer mon récit.

- Avec quelques amies, nous avions projeté il y a 2 ans de partir en vacances ensemble à l’étranger, nous ne savions pas encore quel en serait la destination, mais ne nous voulions pas rester en France. Et puis avec la fin des études, le début de la vie active dans le monde professionnel… , nous n’avons pu partir que l’été dernier. Tout ce voyage s’est décidé au dernier moment, nous avons trouvé la destination sur un site qui proposait des séjours à moitié prix. Il y avait plusieurs destinations : l’Amérique, l’Afrique… mais nous nous sommes tournées vers cette station balnéaire à Ate Dalo en Indonésie.

Lorsque nous avons regardé les photographies de cet endroit, on aurait dit le paradis sur terre, enfin selon nos critères : un hôtel avec piscine devant un Océan d’une couleur turquoise, quelques monts pour y faire de la randonnée, une richesse culinaire et culturelle, des activités aquatiques proposées par l’hôtel… que demander de mieux ?

Alors avec trois amies : Mathilde, Clara et Laura, nous avions tout réservé en quelques instants et deux semaines plus tard nous étions partis pour un voyage de dix jours en Indonésie.

Et lorsque nous sommes arrivées à l’hôtel, le rêve est devenu réalité. À peine nos valises posées dans les chambres, nous nous sommes empressés de nous baigner dans l’océan. Pendant ces dix jours, nous avons pu faire de la plongée sous-marine, déguster des plats et connaître la culture indonésienne, rencontrer de nouvelles personnes, profiter du soleil et de l’océan, se reposer…

Dans notre hôtel, il y avait même des tables où beaucoup de personnes âgées venaient jouer aux cartes en fin de journée, mais aussi une salle dédiée à l’animation de l’hôtel avec piste de danse…

Un matin, Mathilde bronzait tranquillement sur un transat sous un parasol, Laura était partie au bar pour y draguer quelques hommes et Clara et moi sommes allées dans la piscine. Nous discutions de tout et de rien quand soudain, je reçus une balle de football dans le dos. Un petit garçon d’environ six ans couru vers moi et s’excusa en anglais. Je lui dis que ce n’avait pas grave et lui rendit la balle, puis il courut de nouveau pour rejoindre certainement sa mère que j’aperçus au loin. Ensuite, je repris ma discussion avec Clara. Et chaque jour nous permettait de nous reposer et de nous ressourcer.

Cet endroit respirait le bonheur, on pouvait y croiser de nombreuses familles, des couples, des retraités venant de tout pays, enfin surtout de pays riche et développé, mais sur chaque visage, on pouvait y voir la joie, la détente, mais surtout le bonheur.

Le voyage arriva à son terme, mais je décidai de rester une journée de plus contrairement à mes amies afin de passer un niveau en plongée sous-marine, car cela coûte moins cher qu’en France et cela prend aussi moins de temps sur Ate Dalo.

Clara, Mathilde et Laura ne pouvaient pas rester, car elles devaient reprendre leurs travails. Cependant, avant de partir, elles m’ont dit de profiter de ma dernière journée, mais je sentais que quelque chose n’allait pas chez Clara :

- ça ne va pas ?

- J’ai une mauvaise intuition.

- Comment ça ? Concernant l’avion ?

-Je ne sais pas, je ne pense pas, j’ai cette intuition depuis ce matin, comme si quelque chose allait arriver.

- Ne t’inquiète pas tout vas bien se passer, je pense que tu ne veux pas quitter cet endroit paradisiaque et tu es certainement anxieuse concernant l’avion. Mais en un rien de temps, tu seras en France.

- Tu as raison. On t’enverra un message dès notre arrivée.

- J’espère bien.

Puis je les ai vu prendre un taxi en direction de l’aéroport en fin de matinée et je suis partie faire de la plongée tout l’après-midi. Le soir, je suis allée au restaurant et je suis allée admirer pour une dernière soirée le coucher de soleil sur la plage avant d’aller me coucher. Une journée de vacances quelconque me direz-vous.

Je me suis levé vers neuf heures le lendemain matin, j’ai tiré les rideaux de ma chambre et je pouvais voir un magnifique soleil se refléter sur l’océan, cela me prédisait une très belle journée pour faire de la plongée sous-marine. Je descendis prendre le petit-déjeuner dans la salle de restaurant qui donnait une vue sur la piscine, j’entendais les cris et rire des enfants lorsqu’ils jouaient et les adultes discutant autour de la piscine.

Lorsque je suis remontée dans ma chambre d’hôtel, je mis à chauffer la bouilloire afin de me faire un thé, et lorsqu’il fut prêt, je m’installai sur une chaise au balcon de ma chambre et admirai la vue, comme pour imprimer de sublimes photographies dans mon esprit à tout jamais. Puis je fermai les yeux pour entendre et profiter une dernière fois du son des vagues se cassant sur la plage, les feuilles de palmier s’agiter entre elles, mais il n’y avait presque pas de vent aujourd’hui.

Une fois mon thé terminé, j’ai regardé ma montre qui m’indiquait dix heures et demie, j’avais encore quelques heures pour me balader un peu en ville avant de partir pour la plongée cet après-midi. Je pris un sac à dos avec mon portefeuille et une bouteille d’eau au cas où je m’achèterais quelque chose.

Je passai près d’un marché ou était vendu de nombreuses spécialités indonésiennes et notamment le Nasi Goreng qui n’est autre que le plat national indonésien. J’y trouvai notamment un bracelet fait à la main par une vieille habitante de l’île que je pris en souvenir.

Une fois ma balade terminée, je marchai en direction de l’hôtel afin de partir incessamment pour ma sortie de plongée. Mais lors de ce trajet retour, je sentis le sol vibrer à quelques moments mais je n’y ai pas prêté plus d’attention que cela puisqu’il y avait beaucoup de circulation de véhicules en tout genres dans la ville ce jour-là : mobylette, scooter, camion, voiture….

Quand je suis arrivée à l’hôtel, je regardai l’horloge murale pour ne pas me mettre en retard, celle-ci indiquait onze heure neuf, puis je montai dans ma chambre.

Pour accéder à ma chambre, je devais prendre une vingtaine de marches environ, et en montant ces marches, je commençai à entendre des cris, mais pas ceux que j’eus l’habitude d’entendre jusqu'à maintenant, on aurait dit des cris d’effroi ou de peur, ces cris venaient de l’espace aquatique extérieur. Alors en quelques secondes, je courus dans les marches et une fois arrivée dans ma chambre, je regardai immédiatement par la fenêtre s’il s’était passé quelque chose à l’extérieur, mais je ne vis rien d’anormal, il n’y avait pas de personnes blessées, mais je continuai d’entendre ces cris de plus en plus fort.

Et à cet instant, je vis des gens courir en provenance de la plage, mais cette fois-ci, ils couraient comme si leurs vies en dépendaient, et en prêtant réellement attention à ce qu’ils pouvaient bien crier, j’entendis.

« tum » ; « tumi » ; « tuami » ; « TSUNAMI »

Une fois que j’eus compris le mot tsunami, je regardai directement en direction de la plage, les quelques palmiers de l’hôtel me cachait une partie de la vue, mais je pouvais distinguer au loin cette vague déjà très haute et qui continuait de grandir peu à peu au fil des secondes.

Mais en prenant conscience de ce danger imminent, je me suis pétrifiée, incapable de faire le moindre mouvement, de penser quoi que ce soit et de respirer normalement. Cette situation dura bien quelques secondes, mais une fois que je repris mes esprits, je me mis au bord de mon balcon et criai en anglais.

« GET OUT OF THE POOL, TSUNAMI”; “TSUNAMI”

Je répétai cette phrase deux ou trois fois peut-être puis je me dirigeai vers la porte de ma chambre pour descendre et partir. En pensant que je serai assez rapide pour éviter la vague, je commençais à courir vers les escaliers, mais il m’était impossible de descendre, de nombreuses personnes montaient les escaliers pour se réfugier en hauteur, je compris alors que courir loin n’était plus une option envisageable.

Alors je décidai de suivre les quelques personnes qui montaient les marches jusqu’aux troisième et dernier étage de l’hôtel. Dans ce moment de panique générale, je vis des actes de gentillesses incomparables comme des actes de purs égoïsmes : des gens qui n’hésitaient pas à pousser et à doubler des personnes âgées par peur de ne pas monter assez vite et assez haut. Comme quoi, la peur de mourir peut vous inciter à faire de nombreuses choses.

Lorsque nous sommes arrivées au troisième étage, deux personnes forcèrent une des portes d’une chambre et y entrèrent afin d’y creuser un trou menant jusqu’au toit.

Nous devions être une quinzaine au total dans ce troisième étage, chacun se mettait à l’abri comme il le pouvait, car nous savions que ce que nous allions vivre était inévitable, comme un vieux navire qui s’apprête à affronter une grosse tempête. Ainsi, certains sont restés dans le couloir, trois personnes sont restées dans l’escalier, et nous étions 6 à vouloir monter sur le toit.

Je fus, la dernière à devoir monter sur le toit, mais je stressais à chaque fois que quelqu’un devait y monter de peur qu’il ne soit pas assez rapide. C’est à cet instant que je commençai à craindre pour ma vie, car comme beaucoup de personnes ce jour-là, je n’avais aucune envie de mourir.

Juste avant moi se tenait un homme d’une quarantaine d’années, lorsque qu’il commença à grimper sur le toit, j’entendais le crépitement des vagues qui emmenaient tout ce qui se trouvaient sur leurs passages et deux secondes plus tard, j’entendis le hurlement de ceux qui se trouvaient au rez-de-chaussée. Mais les hurlements furent étouffés rapidement par l’eau, et c’est à cet instant que je compris que non seulement l’eau les avait engloutis, mais surtout que cette vague allait monter dans la prochaine seconde en notre direction.

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Edouard PArle
Posté le 16/10/2021
Salut !
Bienvenue sur Plume d'argent (=
C'est une sympathique histoire (enfin pas pour les protagonistes), j'aime beaucoup cette idée de tsunami, je ne me souviens pas avoir lu d'histoire sur ce thème.
Avec le pressentiment de l'amie de la narratrice on se doutait qu'il y allait avoir des complications ^^
Bien envie de lire la suite (=
Quelques coquilles :
" des murs jaunes et bleus sur lesquelles" -> lesquels (murs = masculin)
"je pris une grande inspiration puis souffla" -> soufflai
"beaucoup de personnes âgées venaient joués" -> jouer
"mais aussi une salle dédier à l’animation de l’hôtel" -> dédiée
"puis il couru de nouveau pour rejoindre" -> courut
"Une journée de vacances quelconques" -> quelconque
"ces cris venaient l’espace aquatique extérieur." -> venaient de l'espace
Bien à toi !
S.B PEARCE
Posté le 16/10/2021
Merci beaucoup pour ce commentaire, la suite arrivera bientôt et les coquilles sont retirées. :)
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