4. Reflets

Par Voltage

Arthur regardait l’horizon. Le lever de soleil de la région était magnifique, comme toujours. Ces vives couleurs orangées faisant des reflets magnifiques sur les arbres et se métamorphosaient rapidement en un ciel blanc brillant de clarté. Les rayons du soleil éclairaient de haut à présent. Sa lumière douce éclaircissait le paysage. Mais tout ce qui est beau est de courte durée. Ayant savouré son spectacle, Arthur se détourna du bord de la falaise, dégouté que le ciel virerait bientôt au bleu moche. Il se demandait comment se déroulait « l’interrogatoire » de Brenna. C’est assez étrange, cette situation. Normalement, ils étaient censés l’avoir bouffée depuis longtemps…Mais cette fille avait quelque chose. Quoi, il l’ignorait encore. Mais il était bien déterminé à le découvrir. Il réfléchissait longuement à l’aide qu’il pouvait apporter à Raphaël. Il était en train de l’interroger, mais Arthur doutait qu’elle lui dise grand-chose. S’ils voulaient en découvrir plus sur elle, il fallait tenter une autre approche. Soudain, il eut une idée.

Son campement était toujours en place. Avec ses affaires personnelles dedans. Il pourrait y aller et regarder s’il y trouve quelque chose d’intéressant.

Arthur ne pensait pas que Raphaël approuverait, mais tant pis !

Il sauta, puis glissa le long de la pente raide. De la poussière s’échappait derrière lui. Arrivé en bas, il se réceptionna sur le sol enneigé. « C’est quand même bizarre cet endroit. Près de la falaise il neige, et plus loin il fait beau ». Il leva la tête vers le ciel. Non, il ne rêvait pas, il n’y avait pas de nuages. Cela veut dire que cette neige datait sûrement d’hier matin. En marchant dans la forêt de sapins, la lumière baissait. Elle était tellement dense que la neige n’avait pas percé la barrière de sapins, et des minces rayons de lumière passaient à travers eux. La nuit, cette forêt était terrifiante. Mais pas pour Arthur. Pour lui, cette forêt n’était qu’une seule chose : Le chemin le plus direct pour rejoindre le village le plus proche, et aussi le campement. Pour l’instant, tellement déterminé, il en oubliât le danger immense.

En s’enfonçant dans la forêt, il sentit tout de suite que quelque chose n’allait pas. Il était certain, il était suivi. Et pas par quelqu’un de la meute. Donc il y avait une seule autre possibilité. Mais il la vit trop tard. Il entendit un bruit assourdissant, sans comprendre ce qui arrivait, et la seconde d’après, il était par terre. Du sang coulait le long de son t-shirt. On lui avait tiré dessus. Et la personne savait apparemment bien viser. Une douleur fulgurante lui traversa le torse. Il avait reçu comme une décharge électrique. Ça faisait mal, très mal. La douleur était insupportable. Il se courba, mit sa main sur la plaie, la retira vivement voyant la quantité de sang imprimé dessus. C’était tellement horrible qu’il avait envie de se tuer lui-même pour abréger sa douleur. La forêt autour de lui n’avait plus rien d’apaisant. Elle était maintenant obscure et porteuse de malheur. Il avait été trop sûr de lui lorsqu’il y avait pénétré sans faire attention. Il avait causé son propre malheur. Il avait mal, mal…Il attrapa le téléphone de Brenna, qu’il gardait dans sa poche. Ce n’était vraiment pas le moment d’y faire attention, mais il fut surpris par l’étrangeté du modèle. Il avait une coque bleu foncé mais n’avait rien des téléphones qu’il avait l’habitude de manipuler. Mais c’était sa dernière chance. Il essaya par tous les moyens de pirater le code. Il perdait un peu plus de forces à chaque seconde. Ses paupières menaçaient de se refermer et tout son corps tremblait. Pourquoi il avait essayé de pénétrer sur leur territoire ? (Il réussit enfin à le déverrouiller et composa le numéro de Raphaël) Tout était de sa faute. Il avait 1% de chance qu’il s’en sorte. Il avait agi bêtement. Arthur avait oublié que même les prédateurs étaient des proies. « Tuer ou être tué, comme toujours ». La sonnerie s’éternisait, sans que personne ne réponde. Artur se calma. Ce seraient les derniers sons qu’il entendrait. Il entendit des pas vers lui, sans doute son agresseur. Il sourit intérieurement. Ils l’avaient bien eu.

N’était-ce pas la même erreur qu’avait commis l’Alpha, dix ans plus tôt ?

~*~

- Comment tu le sais ? répéta Raphaël, anxieux

Brenna tentait de se défaire de son emprise, mais il lui tenait toujours fermement le poignet. Cela ne dissimulait pourtant pas le sourire qui grandissait à ses lèvres. Elle tenta une feinte, mais Raphaël l’esquiva avec rapidité. « Il est trop fort » se dit Brenna, tachant de dissimuler sa peur. « Je ne pourrais pas en venir à bout ». Sa seule chance, c’était d’utiliser sa montre. Mais Raphaël avait agrippé le poignet gauche. Elle fronça subitement les sourcils, et son sourire disparut.

- Et toi, comment tu sais pour la montre ?

Les deux adolescents se regardaient fixement. Bizarrement, on aurait dit un jeu. Mais ni Raphaël, ni Brenna n’étaient ici pour jouer. Le portable de Raphaël vibra mais il n’y fit pas attention. Son regard était planté dans celui de Brenna. C’était difficile de soutenir son regard. De ses yeux bleus émanaient une intensité incroyable, comme une étincelle. Ce fut Brenna qui céda :

- Bon, dis-moi comment tu sais pour la montre, et je t’expliquerai peut-être ce que j’ai fait d’étrange dont tu n’as pas connaissance.

- Ça ne marche pas comme ça, rétorqua Raphaël

Brenna mit son bras droit mains sur ses hanches et réfléchit à un moyen de l’emporter. Mais on ne gagnait pas toujours. Ça se voyait qu’il avait un esprit fort. Pas comme les autres membres de la meute. Il réfléchissait beaucoup avant d’agir. Mais soudain elle eut comme un flash. Elle perdit connaissance subitement. Le noir se faisait autour d’elle. Elle allait tomber sur le sol et se fracasser le crâne. Mais elle n’y pouvait rien. Lors de sa perte de connaissance, mille images défilèrent devant ses yeux, des choses que les autres ne pouvaient pas voir. Elle aurait pu s’écrouler sur le sol et avoir une commotion cérébrale, mais Raphaël l’avait rattrapée à temps. Elle ouvrit les yeux. Raphaël la tenait. Il ne l’avait pas laissée tomber. Elle sourit et lui dit :

- Ne t’occupe pas de moi, occupe-toi plutôt de ton ami. Il s’est pris une balle dans la forêt.

- Comment… ? commença Raphaël

Et il fit tout de suite le lien. La vibration de tout à l’heure. Arthur avait tenté de le joindre avec le portable de Brenna. Il reposa lentement Brenna sur une chaise, constatant qu’elle n’arriverait sûrement pas à tenir debout maintenant, puis regarda son portable. L’appel avait eu lieu il y a cinq minutes. C’était trop tard. Mais Brenna se leva soudainement de sa chaise, plus déterminée que jamais. Elle prit le poignet de Raphaël et l’entraina hors de la cabane. Troublé, il n’osa rien demander. Mais Brenna lui dit :

- Si tu veux avoir une chance de sauver ton ami, tu as intérêt à courir vite.

Ils descendirent les marches de la cabane. Brenna était toujours chancelante, et Raphaël l’avait remarqué, mais elle continuait de courir malgré son mal de tête. Tout en courant vers la forêt de sapins, Brenna ajouta :

- Et toi soit reconnaissant, je suis en train de gâcher une journée pour des choses qui ne devraient même pas perturber mon attention, alors que je suis censée retrouver le salopard qui a tué ma sœur, dit-elle avec une pointe de tristesse dans la voix.

*

Le jour se levait très vite et on y voyait de plus en plus clair. C’était plutôt un bon point, qui permettait enfin à Brenna et Raphaël de savoir où ils mettaient les pieds. Mais ils étaient encore loin de la zone des sapins et de la neige, et si Raphaël n’avait pas été présent pour les guider vers l’emplacement d’Arthur, Brenna n’aurait jamais trouvée seule l’endroit.

- C’est un véritable labyrinthe cet endroit ! s’écria Brenna en courant tout en esquivant les branches des arbres.

- Faut savoir se repérer, c’est tout.

Ils arrivèrent devant ce qu’on peut appeler une cage de sapins. Une énorme voute de sapins entourait un chemin fermé. Voyant que Brenna voulait poursuivre, Raphaël, reconnaissant tout de suite l’endroit (et ses dangers) lui demanda de s’arrêter. Etonnée, celle-ci lui demanda pourquoi mais n’eut pas de réponse. Elle était pourtant certaine qu’Arthur était ici. Elle l’avait vu. Brenna insista pour passer mais Raphaël lui barra le passage.

- Je sais que mon ami est là-dedans, se justifia-t-il.

- Bah alors va le chercher ! s’emporta Brenna.

Mais Raphaël restait de marbre. Brenna ne comprenait pas pourquoi. Ne voulait-il pas sauver son ami ? Il savait autant qu’elle que le temps était compté. Il ne bougeait pas. Brenna essaya encore une fois de passer, et Raphaël la laissa faire. Lorsqu’elle reprit sa course, il ne la suivit pas. La lumière diminuait et le vent faisait s’envoler ses cheveux bruns. Elle accéléra le pas. Brenna avait toujours aussi mal à la tête. Son esprit tournait, entraînant son corps sur le côté et menaçant de l’entrainer par terre.

- Tu vas te faire tuer, dit Raphaël au loin, avec de l’amertume dans la voix.

Sa voix disparut en écho lorsqu’elle ne vit de la lumière du jour que les minces rayons filtrés par les (centaines de) sapins. Elle s’était enfoncée profondément. Elle continuait à courir. Ne pas s’arrêter. Continuer. Mais sa tête tournait trop. Essoufflée, elle s’arrêta, et posa ses mains sur ses genoux. Comment avait-il pu abandonner son ami, alors qu’elle, qui ne le connaissait que depuis quelques heures, voulait le sauver ? Avait-il peur ? Non, pas Raphaël. Nathan à la limite…Mais pas Raphaël. Alors pourquoi ? Est-ce qu’il y avait un danger dans cette forêt qui repoussait même les plus courageux ? Pourtant, la meute de la mère des loups était la seule dans cette région. Une seule pensée persistait dans son esprit. « Traître », « lâche ». La colère montait en elle. C’était ce qu’elle détestait le plus.

Brenna leva la tête. Qu’est-ce qu’elle en avait à faire ?! Elle était là pour enquêter sur le meurtre de sa sœur et sur les leftmoons, point barre. Mais laisser quelqu’un mourir…De toute manière, enquêter vers l’endroit où sa sœur avait disparu était nettement plus dangereux que d’aller vers une zone où elle pouvait esquiver les balles.

Bizarrement, les deux chemins qui se trouvaient devant elle menaient aux deux destinations. Brenna était tiraillée de l’intérieur.

Elle avait deux possibilités, deux chemins. À elle de choisir.

Brenna se redressa et en choisit un, s’enfonçant vers le pire des dangers…

(Deuxième partie à paraître)

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